LA RENCONTRE D'IVOIS (1023)
Les
10 et 11 août 1023, à Ivois, petit village de la Meuse, Robert
le Pieux rencontre l'Empereur et roi de Germanie Henri II. Les deux souverains
vont conférer sur la réforme monastique, la paix de Dieu et sur
une éventuelle attitude commune à adopter vis à vis des
vassaux. Mais la rencontre, qui s'est terminée par la confirmation d'un
pacte d'amitié réciproque, restera sans suite...
Le roi de France Robert II le Pieux et l'empereur
et roi de Germanie Henri II sont également puissants. Aux marges de leurs
royaumes respectifs, en Flandre, en Lorraine, en Bourgogne et jusqu'en Italie,
ils ont maintes fois été amenés à se heurter. Ni
l'un ni l'autre n'a cependant le dessein de reconstituer le grand empire carolingien,
dont tous deux se considèrent comme les héritiers. Leur intérêt,
en particulier face aux velléités d'indépendance des grands
féodaux, est plutôt de s'entendre. En 1006, à l'initiative
de l'Empereur, ils se sont rencontrés sur la Meuse. A l'occasion de cette
entrevue, la première entre un Capétien et un souverain germanique,
Robert le Pieux et Henri II se sont mutuellement appréciés et
sont allés ensuite ensemble guerroyer contre le comte Baudoin IV de Flandre.
Depuis lors, ils sont restés en excellents termes. Le roi Robert et Henri
II ont en commun une profonde piété. L'Empereur que l'on surnomme
Henri le Saint, est étroitement lié à l'abbaye bourguignonne
de Cluny. L'abbé Odilon est persuadé que ces deux puissants ont
non seulement intérêt à s'entendre, mais aussi que leur
alliance, excellente pour la paix, est un exemple à suivre. Sans doute,
dans l'ombre, a-t-il d'ailleurs milité pour que les souverains se rencontrent
de nouveau.
Au printemps 1023, Henri II délègue
deux émissaires, l'évêque Gérard de Cambrai et l'abbé
Richard de Saint Vasne, auprès de Robert le Pieux. Lors de l'assemblée
de Compiègne, réunie le 1er mai, le roi accède à
la requête des plénipotentiaires impériaux. Il est entendu
que, comme le veut la tradition, il rencontrera l'Empereur sur la Meuse, à
la frontière des deux royaumes. Les pourparlers porteront sur le soutien
à apporter à la réforme monastique et sur la paix de Dieu,
destinée à protéger les églises, les pauvres et
tous les non combattants du fléau des guerres privées entre grands
seigneurs. Ce sera également l'occasion de s'entendre sur l'attitude
à adopter vis-à-vis d'Eudes de Blois, qui s'oppose à Robert
le Pieux à propos de la succession d'Etienne de Champagne, comte de Meaux
et de Troyes, et se montre par trop entreprenant en terre d'Empire en faisant
fortifier nombre de places frontalières en Lorraine. Enfin, on envisagera
une éventuelle médiation du roi à propos du vif dissentiment
qui règne entre l'Empereur et le comte de Flandre.
Au cours de la première semaine
d'août, Robert le Pieux et Henri II, l'un comme l'autre en grand équipage
et accompagnés d'une suite brillante, font leur arrivée sur le
lieu de la rencontre. Robert le Pieux établit son camp sur la rive gauche
de la Meuse, sur un domaine appartenant à l'abbaye de Mouzon. Henri II s'installe
sur la rive droite, près du petit village d'Ivois. Pour montrer que ni
l'un ni l'autre n'a la préséance, on songe à tenir la conférence
au beau milieu de la rivière, sur la ligne de la frontière qui
sépare les deux royaumes. Mais s'entretenir longuement dans deux barques
arrimées l'une à l'autre n'est guère confortable et pourrait
présenter un certain danger. A l'aube du 10 août finalement,
Henri II franchit la Meuse. Pour signifier clairement qu'il se sent parfaitement
en confiance, il se rend au camp de Robert le Pieux avec une escorte réduite.
Le roi lui fait un accueil digne de son rang. Puis, les souverains échangent
des baisers de paix, se jurent mutuellement amitié, assistant la messe
et déjeunent joyeusement. Le lendemain, c'est au roi de rendre sa visite
à l'Empereur et d'être reçu avec les mêmes honneurs.
A l'issue des pourparlers, un diplôme est délivré en commun
en faveur de la cathédrale Saint Etienne de Limoges et il est décidé
qu'un concile universel sera réuni l'année suivante à Pavie.
"Ici furent faites une définition
globale de la paix et de la justice et la réconciliation d'une amitié
mutuelle. Ici fut également traité avec la plus profonde diligence
et à fond de la paix de la Sainte Eglise de Dieu",
précise L'Histoire des évêques de Cambrai.
"Puis,
les souverains confirmèrent leur pacte d'amitié réciproque
et chacun regagna son royaume", relate le moine chroniqueur
Raoul Glaber. Mais la mort de l'Empereur, le 13 juillet 1024, fera que la rencontre
d'Ivois n'aura pas de suite.
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