LES VALOIS DIRECTS
LOUIS XII, LES ARTS ET LES SCIENCES |
LA MYSTERIEUSE TENTURE DE LA "DAME A LA LICORNE" La Dame à la Licorne a été redécouverte par l'écrivain Georges Sand en 1844 au château de Boussac, dans la Creuse. Elle est aujourd'hui exposée au musée du Moyen Age, à l'hôtel de Cluny, à Paris, dans une salle spécialement aménagée pour l'accueillir. Cette tenture, composée de six tapisseries, a échauffé les imaginations et suscité, à propos de son origine, maintes hypothèses, des plus savantes aux plus romanesques et aux plus fantaisistes. Réalisé à la fin du XIVème ou au début du XVème siècle, ce chef-d'oeuvre garde encore sa part de mystère. Et un charme suranné qui, peut-être enchanta le roi Louis XII et sa Cour... Au Moyen Age, la tapisserie a une fonction et des formes très originales, obéissant à des lois propres qui lui donnent un charme et une résonance poétique particulières. Elle est alors destinée soit à réchauffer et embellir des intérieurs froids et sombres, soit en raison de la préciosité des matériaux utilisés et l'ampleur du travail que certaines pièces représentent, à faire des cadeaux ou réaliser un "placement". Dès le XVème siècle, on peut ainsi dégager des types et des modes. Tel est le cas d'un groupe de tapisseries dit "mille fleurs" ou "verdures". Sur un fond généralement bleu ou rouge, sont disposés des bouquets de fleurs au milieu desquels apparaissent des animaux de toutes sortes et quelques arbres. Bien que d'inégale qualité, ces tapisseries semblent avoir eu un réel succès. Certaines sont de véritables chefs-d'oeuvre ; ainsi les six pièces composant la tenture de la "Dame à la Licorne". Celles-ci sont d'une étonnante diversité. Elles mettent en scène un lion et une licorne entourant la jeune femme dans un cadre somptueux, peuplé d'animaux et de détails savoureux. Les couleurs et la qualité du tissage en renforcent encore l'éclat. Au XIXème siècle, devant tant de raffinement et de richesse, certains se sont pris à rêver. La suite de la "Dame à la Licorne" aurait été tissée pour un prince d'Orient. Longtemps prisonnier en France, celui-ci aurait voulu ainsi garder le souvenir de l'élue de son coeur, ce qui expliquerait que la Dame figure sur les six pièces. En 1883, le rêve s'évanouit. On identifie alors les armoiries "de gueules à la bande d'azur chargée de trois croissants montants d'argent" tissées sur chacune des pièces, comme celles de Jean Le Viste, grand administrateur du royaume, mort en 1500. Mais l'affaire connaît de nouveaux rebondissements ! Le romantisme aidant, on voit dans les attitudes rêveuses de la jeune femme et la mystérieuse inscription "A mon seul désir" de la sixième pièce, le signe que cette tapisserie est un cadeau, celui que Jean Le Viste destine à sa fiancée à l'occasion de son mariage. Mais l'héraldique vient encore froidement démentir l'interprétation reposant sur une belle histoire d'amour. En effet, s'agissant d'un présent de noces, les armoiries de la jeune femme auraient dû apparaître aux côté de celles de son mari. Il faut donc s'en tenir au fait que cette tenture est destinée à proclamer (comme souvent dans la présentation des blasons) la gloire de son propriétaire dont les armes sont tenues par le lion et la licorne figurant sur chacune des pièces. Bien que l'énigme iconographique révèle qu'il s'est agi de faire honneur au commanditaire, Jean Le Viste, on s'attendrait plutôt à le voir représenté lui-même à l'occasion d'évènements particuliers ou de services rendus au royaume. Les cinq premières pièces illustrent
les cinq sens. La jeune femme richement vêtue d'une robe de brocart tend un miroir dans
lequel se reflète la tête de la licorne : voici la Vue. L'Ouïe est signifiée par
l'image de la Dame actionnant un instrument de musique. L'Odorat est figuré par les
fleurs qu'elle tresse et à l'oeillet que respire le petit singe juché à ses
côtés. L'animal familier porte une friandise à sa bouche tandis que la Dame se sert
dans un drageoir, il s'agit du Goût. Quant au Toucher, il est délicatement évoqué par
la main que la jeune femme pose sur la corne de l'animal mythique, tandis que, de l'autre,
elle tient fermement la lance des armoiries. Page MAJ ou créée le |