LES CAPETIENS
LOUIS VI LE GROS, SA VIE

 

ADELAIDE DE SAVOIE : REINE ET FEMME DE POUVOIR

Depuis que son union avec Lucienne de Rochefort a été annulée par l'Eglise, Louis VI n'est pas pressé de convoler. Grand chasseur, gros mangeur, solide buveur, le roi entend profiter pleinement de la vie. Après une jeunesse agitée, il cèdera, vers l'âge de trente cinq ans, aux objurgations pressantes des partisans de la dynastie capétienne et des évêques, et épousera Adélaïde de Savoie, le 3 août 1115.

L'évêque Yves de Chartres, conseiller de Louis VI, tient absolument à ce que le Capétien change de vie et s'engage dans des liens réguliers, non seulement pour "apaiser les mouvements charnels et les désirs illicites", mais aussi pour "que sorte bientôt de sa chair celui qui doit rendre vaines les espérances des ambitieux et fixer sur une seule tête l'affection changeante de ses sujets".
Le 3 août 1115, le roi épouse donc Adélaïde de Savoie. De vingt ans sa cadette, elle est la fille d'Humbert II de Maurienne et descend des comtes de Bourgogne, lignage peu puissant mais très bien allié. Mais la jeune femme est fort laide. A un point tel que son précédent fiancé, le comte de Hainaut, l'a refusée sitôt après l'avoir vue et s'est empressé de se trouver une compagne plus gracieuse.

Cependant, Adélaïde remplit parfaitement son rôle auprès de son royal époux. D'abord, elle assure l'avenir de la dynastie. Elle donnera au souverain neuf enfants, dont deux mourront en bas âge et sept survivront : une fille et six fils, dont le futur Louis VII. Et puis, le roi a trop vu dans quelles difficultés inextricables les unions intempestives ont jeté son père, et les déboires de Philippe 1er avec Bertrade de Montfort lui ont servi de leçon. Après avoir pleinement profité des plaisirs de la vie, il a renoncé à ses débauches et aspire désormais à jouir d'un foyer solide et paisible. C'est ce qu'Adélaïde lui offre : douce, intelligente et très pieuse, elle lui convient.
Mais le rôle de la reine ne s'arrête pas là. Son heureuse fécondité et sa conduite irréprochable lui assurent bientôt un ascendant certain sur le roi. Son pouvoir augmente encore en 1119, lorsque son oncle, l'archevêque Gui de Vienne, accède au trône pontifical et devient le pape Calixte II. On trouve jusque dans les diplômes de Louis VI le signe de l'affection profonde qu'il porte à son épouse. Il est le seul de tous les Capétiens à dater ses actes officiels de l'année du couronnement de la reine, le seul qui mentionne aussi fréquemment sa participation ou son assentiment aux mesures prises pour le bon gouvernement du royaume. L'influence d'Adélaïde s'exprime concrètement dans la politique de rapprochement avec le Saint Siège; au côté du roi, elle contribue au développement des lieux de prière et préside à la fondation de l'abbaye de Montmartre.

En 1127, la reine Adélaïde l'incite également à évincer du pouvoir la famille des Garlande. Elle ne peut supporter l'influence sans bornes, autres que celle qu'elle pose, qu'exerce auprès auprès de Louis VI le chancelier Etienne de Garlande, avec qui elle est entrée en rivalité dès les premiers temps de son mariage. Garlande n'a ni la souplesse ni la prévoyance nécessaires pour se se concilier les bonnes grâces d'une personnalité impossible à écarter. Loin de ménager la reine, il se plaît au contraire à l'irriter en multipliant les tracasseries, et les occasions de conflit sont nombreuses.
Quand Louis VI meurt de dysenterie, en 1137, Adélaïde n'a que 37 ans. Elle n'a pas l'obligation d'exercer la régence, puisque son fils, âgé de 17 ans, a déjà l'habitude du pouvoir. Et, très peu de temps après le trépas du roi, elle se remarie avec le connétable Mathieu de Montmorency.
A la Cour, il ne manque pas de personnages disposés à exercer leur influence sur le jeune Louis VII. Ils se regroupent en deux camps, dont la rivalité occupe les toutes premières années du règne. La reine mère est écartée après un éclat (elle a reproché à son fils sa prodigalité), mais sera rappelée dès la fin de 1138, en même temps que le sénéchal Raoul de Vermandois, qui l'a suivie dans sa disgrâce. Cependant, elle ressent assez rapidement le besoin de s'éloigner de la vie mondaine et de songer à son salut. En 1153, elle se retire dans cette abbaye de Montmartre qu'elle a fondée. C'est là qu'elle meurt, le 18 novembre 1154, après une existence toute en demi-teinte, mais sagement et judicieusement menée.

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