LES CAPETIENS
LOUIS VI LE GROS, CHEF DE GUERRE

 

LOUIS VI CONTRE HENRI 1ER BEAUCLERC : LA DEFAITE DE BREMULE
(2 AOUT 1119)

Depuis que, en 1106, Henri 1er Beauclerc a lié les destinées de la Normandie et de l'Angleterre, le royaume de France est en danger : les Anglais ont une tête de pont sur le continent! Le duché normand est une constante préoccupation pour Louis VI, qui n'a de cesse de le séparer de la couronne d'Angleterre. La guerre va durer près de vingt ans et verra la défaite du Capétien à la bataille de Brémule, le 20 août 1119.

Le rapport de forces entre Louis VI et Henri 1er Beauclerc, dernier fils de Guillaume le Conquérant, est très inégal. Roi d'Angleterre, Henri 1er est aussi duc de Normandie : ayant ainsi facilement accès au coeur de l'Etat capétien, voisin de ses possessions continentales, il peut en outre compter sur le soutien des féodaux rebelles à l'autorité du roi de France. Mais le Capétien, allié aux Flamands, aux Angevins et à une partie de la noblesse normande, va obliger l'Angleterre à éparpiller ses forces sur trois fronts en même temps. Entre 1109 et 1128, alors que les hostilités sont quasi permanentes, Louis VI parvient à résister aux assauts d'Henri 1er et à consolider ses positions. Une première guerre éclate en 1109 et s'achève en 1113 par le traité de Gisors, humiliant pour le Capétien car il laisse à Henri 1er la suzeraineté sur le Maine et la Bretagne, et fait de la Normandie une puissance presque indépendante. Le roi de France riposte en soutenant les prétentions de Guillaume Cliton, fils du duc Robert Courteheuse que son cadet Henri 1er a spolié de son héritage, contre Guillaume Adelin, fils aîné du roi d'Angleterre. Un deuxième conflit débute en 1116. Au printemps 1118, Henri 1er, attaqué à la fois par les Français, les Flamands, les Angevins et les Normands qui ont épousé la cause de Guillaume Cliton, doit céder un terrain considérable dans le Vexin et dans le Maine.

L'année suivante, cette situation favorable au Capétien est renversée. D'une part, en donnant sa fille Mathilde en mariage à Guillaume Adelin, le comte Foulque d'Anjou change de camp. D'autre part, comme il avance en territoire ennemi, Louis VI est surpris par une forte armée anglaise. Contre l'avis de ses compagnons, il met un point d'honneur à l'affronter, le 20 août 1119, dans la plaine de Brémule, à une vingtaine de kilomètres à l'est de Rouen. La bataille fait peu de morts, mais, son cheval ayant été tué sous lui, le roi de France subit un cruel revers et se réfugie aux Andelys. En septembre, il assiège en vain Breteuil. Fou de rage, il jure de brûler Chartres pour se venger du comte Thibaud de Blois, allié d'Henri 1er, et il faudra tous les efforts du clergé pour l'en dissuader.
Le 3 octobre, Louis VI a une entrevue avec le pape Calixte II, oncle de la reine Adélaïde de Savoie, qui se rend à Reims pour ouvrir un concile et à qui il demande de condamner Henri 1er. Le souverain pontife se contente de négocier, en vain, avec le roi d'Angleterre. En 1120, le Capétien se voit contraint de négocier un nouveau traité : il obtient pour seul (petit) avantage que Guillaume Adelin lui rende hommage pour la Normandie. La donne change quand, le 25 novembre, l'héritier d'Henri 1er périt dans le naufrage de la Blanche Nef au cours de la traversée qui devait le mener vers son suzerain. Cette disparition incite Guillaume Cliton à revendiquer la succession, avec de nouveau le soutien de Louis VI : une troisième guerre éclate.

Grâce à sa promptitude et à son énergie, Henri 1er prend le dessus en 1123 et mobilise son gendre, l'Empereur Henri V, pour prendre le royaume capétien en étau. Au cours de l'été 1124, en Champagne, impressionné par l'ost royal rassemblé derrière l'étendard de Saint Denis, l'Empereur refuse le combat. Dès lors, le roi d'Angleterre ne peut plus compter que sur lui-même...
Le conflit se poursuit, plus diplomatique que militaire, par la négociation d'alliances matrimoniales. Louis VI offre la main de sa belle-soeur et le Vexin à Guillaume Cliton, qu'il tente ensuite d'installer à la tête du comté de Flandre. Henri 1er réplique en mariant sa fille Mathilde, veuve de l'Empereur Henri V depuis 1125, à l'angevin Geoffroi le Bel, dit "Plantagenêt".
La mort prématurée de Guillaume Cliton, en 1127, bouleverse les plans du Capétien. Celui-ci ne pourra reprendre le dessus en Normandie qu'en 1135, quand la disparition d'Henri 1er donnera le coup d'envoi à une longue et sanglante guerre de succession au trône d'Angleterre entre Mathilde et Etienne de Blois.
Si Louis VI n'a pas réussi à défaire l'oeuvre de Guillaume le Conquérant, à désunir l'Angleterre et la Normandie, il a renforcé le domaine royal et l'autorité monarchique. Une période de paix de trente ans s'ouvre entre les deux royaumes. Mais l'union de l'héritière d'Henri 1er Beauclerc avec le chef de la Maison d'Anjou a posé les bases du futur Etat Plantagenêt, et un avenir sombre se prépare.

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