LES CAPETIENS
LOUIS VI LE GROS, CHEF DE
GUERRE
LOUIS VI EN CHAMPAGNE : L'EMPEREUR RECULE DEVANT L'OST ROYAL
(ETE 1124)
Henri 1er Beauclerc, roi d'Angleterre et duc de Normandie, a convaincu son gendre, l'Empereur Henri V, de s'attaquer à la bonne ville de Reims. Louis VI riposte en convoquant tous ses vassaux. Les forces qu'il rassemble derrière l'étendard de Saint Denis sont si impressionnantes que, au cours de l'été 1124, l'Empereur préfère battre en retraite, sans même se risquer à combattre.
Le roi de France a un rival qui lui cause
bien du souci : Henri 1er Beauclerc, roi d'Angleterre et duc de Normandie. Depuis
1109, en effet, le Capétien est en conflit avec le plus jeune des fils de Guillaume
le Conquérant. En 1113, celui-ci a obtenu la suzeraineté sur le Maine et la
Bretagne. Et si les barons normands n'avaient pas été divisés, Louis VI le Gros
aurait été en bien fâcheuse posture.
En 1124, Henri 1er Beauclerc entraîne
son gendre, l'Empereur Henri V, dans une alliance offensive contre Louis VI.
Depuis que, à la demande du Capétien, il a été condamné par le pape Calixte
II et le concile de Reims en octobre 1119, l'Empereur ne songe plus qu'à assouvir
sa vengeance. Son beau-père n'a donc pas besoin d'insister beaucoup pour le
convaincre de rassembler son armée à Metz et de marcher sur Reims. Devant cette
menace, le roi de France n'hésite pas une seconde : en juillet 1124, il lève
des troupes et convoque sa noblesse pour faire valoir son bon droit.
Certains chevaliers soutiennent qu'il vaut
mieux attendre que l'ennemi pénètre au coeur du royaume car, coupé de ses arrières,
il sera ainsi plus facile à vaincre. D'autres conseillent de fortifier les villes
ouvertes et d'installer des garnisons dans les places fortes. Mais louis VI
redoute la "rapacité teutonne". "Ce
n'est pas ainsi qu'il faut procéder; il faut sans retard un levée de chevaliers
et, se plaçant à l'extrême frontière du royaume, tel un mur inébranlable, attendre
de pied ferme nos adversaires", déclare le roi.
Au
début du mois d'août, le souverain se rend à Saint Denis. En ce lieu saint,
qui s'affirme peu à peu comme le haut lieu de la royauté, il prie avec ferveur
et se recueille sur les reliques. Au cours de la cérémonie, il concède de nouveaux
privilèges à l'abbaye et fixe comme limites à sa justice d'un côté le cours
de la Seine, de l'autre les hauteurs d'Aubervilliers, soit un territoire embrassant
à peu près les paroisses actuelles de Saint Denis et de la Courneuve. Puis,
Louis VI se saisit de l'oriflamme déposée sur l'autel et invite la France
entière à le suivre. De toutes parts, la chevalerie se lève, on délègue des
hommes, on rassemble des armes pour lutter contre cet ennemi qui a l'audace
de menacer le royaume.
Hugues de Bourgogne, Germain de Nevers, Raoul de Vermandois,
Charles de Flandre, Hugues de Troyes, Foulques d'Angers, Conan de Bretagne,
Guillaume d'Aquitaine : tous les grands vassaux sont là. Même le comte palatin
Thibaud de Blois a répondu présent, bien qu'il soit en conflit ouvert avec le
roi. Tous brûlent de faire rendre raison à l'Empereur et de porter la guerre
sur ses domaines.
Derrière l'étendard de Saint Denis, l'armée
royale se met en marche. A Reims, elle attend les Impériaux de pied ferme. Les
grands vassaux veillent à l'ordonnancement de cinq corps de bataille, composés
chacun de plusieurs milliers d'hommes, aussi bien chevaliers que gens de pied.
Le roi prend la tête du troisième corps, celui d'Orléans, d'Etampes, de Paris
et de l'ost de Saint Denis. Afin de pourvoir au ravitaillement des troupes,
on organise des convois de charrettes qui permettront de transporter du pain,
de l'eau et du vin à proximité du champ de bataille et où les blessés pourront
se faire soigner avant de repartir au combat.
Emportée par son enthousiasme,
l'armée du roi passe la frontière et massacre quelque 2 000 Impériaux avançant
en bandes désordonnées. Effrayé par la puissance des forces qu'a réunies Louis
VI, L'Empereur recule. Ses effectifs sont restreints, et il vient d'apprendre
qu'à l'arrière la population de Worms, faisant fi de la volonté impériale, a
rétabli l'évêque sur son siège et s'est barricadée derrière les murs de la ville,
prête à se soulever. Le 14 août, Henri V, sans même avoir combattu, fait retraite
vers Metz, préférant subir la honte d'une défection que d'exposer sa personne
et son Empire aux représailles.
Du côté français, on considère ce dénouement
comme une victoire retentissante; bien plus, selon l'abbé Suger, le conseiller
de Louis VI, que si les Impériaux avaient été défaits au cours d'une bataille
rangée.
Le souverain, fort satisfait, s'en retourne à Saint Denis, où il
remet solennellement en place les châsses d'argent abritant les reliques, qui
sont restées sur l'autel pendant que l'ost était rassemblé pour la guerre. Puis,
pour bien témoigner sa reconnaissance, il octroie à l'abbaye des terres et de
nouveaux privilèges.
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