LES CAPETIENS
PHILIPPE V LE LONG ET LES PERSONNALITES

 

JEAN XXII, UN PAPE TRES FRANCOPHILE

Les relations qui vont s'établir entre Philippe V le Long et le pape Jean XXII seront comparables à celles qui ont uni Philippe IV le Bel et Clément V. Au cours de ses dix huit années de pontificat, le plus important des papes d'Avignon voit souvent ses intérêts concorder avec ceux du Capétien, et il restera toujours reconnaissant à celui qui a favorisé son élection le 7 août 1316.

Le pape Clément V est mort le 20 avril 1314. Lors du conclave qui s'est tenu à Carpentras du 1er mai au 24 juillet suivants, Philippe le Bel a tenté d'imposer son ancien confesseur, le cardinal Nicolas de Fréauville; mais, étant mort en novembre, il n'a pu parvenir à ses fins. En juin 1316, Louis X le Hutin s'est éteint alors que la reine Clémence de Hongrie était enceinte. En attendant la naissance de l'enfant, la régence est assurée par le frère cadet du roi défunt, le futur Philippe V le Long. Alors que le trône pontifical est toujours vacant, le régent entre à son tour en scène en soutenant la candidature de l'évêque de Fréjus, Jacques Duèse.

Issu d'une riche famille bourgeoise de Cahors, Jacques Duèse a suivi des études de droit dans les universités d'Orléans et de Paris. Il a mis ses connaissances juridiques en pratique en entrant au service de Charles II d'Anjou, comte de Provence et roi de Sicile, à qui il a peut-être été recommandé par un compatriote de Cahors. Il a également occupé la fonction de précepteur du fils de ce prince, le futur saint Louis de Toulouse. En 1300, il a été nommé évêque de Fréjus puis, en 1308, il a été appelé à la Cour papale d'Avignon et deux ans plus tard a été fait cardinal. Homme à la piété sincère, à la vaste culture, doté d'un physique chétif mais pourtant d'une grande résistance physique et d'une exceptionelle force de travail, c'est à cette époque qu'il s'attire la sympathie du futur Philippe V le Long. Le 28 juin 1316, lorsque le second conclave s'ouvre à Lyon, le régent soutient sa candidature au trône pontifical, bien qu'il ait déjà largement passé la soixantaine.
Les cardinaux qui délibèrent dans l'église des Jacobins à Lyon sont soumis à une très forte pression, exercée par Philippe de Poitiers qui tente de les intimider par l'intermédiaire des hommes d'armes du comte de Forez. Les cardinaux se sentent à la merci du Capétien, qui a déjà fait montre de sa rudesse et qui est surtout le fils de Philippe le Bel, qui s'est opposé avec détermination à la papauté. Le 7  août 1316, sitôt que Jacques Duèse est élu pape sous le nom de Jean XXII, le régent se rend à Lyon pour assister à son couronnement.

Avant même son avènement, en novembre 1316, puis tout au long de son règne, Philippe le Long considère la pape comme son "oeuvre". Il réclame son concours comme un droit indiscutable, lui rappelle son origine française et l'invite à conserver des sentiments français. Les prières qu'il lui adresse dans ses lettres ressemblent parfois à des ordres, et il n'est pas très éloigné de le traiter comme un simple seigneur ecclésiastique. Comme il peut le faire avec ses feudataires, il lui offre de nombreux et somptueux présents pour entretenir son amitié. De son côté, Jean XXII s'empresse de reconnaître le prince comme régent, l'assure de son affection paternelle et de son entier dévouement "à la Maison de France bénie de Dieu". Il ordonne des prières publiques en sa faveur : vingt jours d'indulgence sont assurés à qui priera pour le régent, puis quarante jours à qui priera pour le roi, la reine et leurs enfants.
Cependant, Jean XXII a une pensée personnelle, et il ne faudrait pas caricaturer ses relations avec le Capétien en le considérant comme un instrument aveugle au service des royaumes de France et de Naples. Certes, il apporte à Philippe le Long un concours précieux dans les affaires d'Angleterre, d'Artois et surtout de Flandre, recourant aussi bien à ses armes spirituelles que matérielles : il accorde quatre ans de suite des aides payées par le clergé, comme les annates et les décimes, qui devaient servir pour la croisade, mais qu'il permet d'utiliser pour "la défense du royaume". S'il agit ainsi, c'est parce que le roi l'aide à lutter contre ses nombreux ennemis en Allemagne et en Italie
De fait, Philippe le Long et Jean XXII mènent une "politique franco-pontificale" dans laquelle, il est vrai, l'élément français domine : le pape n'est plus le chef politique du monde chrétien, et si l'Eglise d'Avignon demeure l'Eglise nationale de France, suzeraine des autres Eglises, elle est elle-même dépendante d'un roi.

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