LES CAPETIENS
LOUIS
X LE HUTIN, CHEF DE GUERRE
LOUIS X LE HUTIN S'ENLISE EN FLANDRE
(25 juillet 1315)
Provisoirement pacifiée par Philippe IV le Bel, la Flandre refuse d'exécuter les clauses de la convention de Marquette de septembre 1314. Le 25 juillet 1315, Louis X le Hutin va prendre l'oriflamme à l'abbaye de Saint Denis et marcher sur la province rebelle. Mais cette expédition militaire va se solder par un humiliant échec.
A la fin de l'été 1314, Philippe le Bel a provisoirement pacifié la Flandre. Mais, depuis sa mort, en novembre suivant, le comté est de nouveau en proie à l'agitation et refuse d'exécuter les clauses de la convention de Marquette signée en septembre 1314. Louis X le Hutin, qui a succédé à son père, décide de mater la rébellion et de conduire une expédition militaire dans les plaines de Flandre, où il a déjà maintes fois combattu. Le 25 juillet 1315, il prend l'oriflamme à l'abbaye de Saint Denis et se met en marche avec ses deux frères, les comtes de Poitiers et de La Marche, futurs Philippe V le Long et Charles IV le Bel, et les principaux chefs de l'armée royale. Philippe de Poitiers est à la tête de trois cents gens d'armes; secondé par deux maréchaux, Regnaut de Lor et Le Borgne de Céris, ainsi que par Henri de Sully et le vieux sire Jean de Joinville, âgé de quatre vingt onze ans.
Malgré le traité conclu cinq ans auparavant
avec le comte Robert de Béthune, Guillaume de Hainaut fournit à
Louis X de nombreux hommes issus de son comté, de Frise et de Hollande,
et rejoint en personne l'armée royale. Avant que le Capétien n'arrive
à la frontière, Robert de Béthune s'empresse de mettre
le siège devant Lille, tenue par une garnison française. Ayant
des intelligences dans la place, il espère qu'un coup de main suffira
à lui permettre de s'en saisir. Mais les royaux s'approchent trop vite,
l'obligeant à se replier derrière la Lys, du côté
de Courtrai.
A la mi-août, le roi, entrant par l'Artois, vient établir
son camp dans la plaine qui s'étend entre Lillers et Hénin Liétard.
Dès qu'il apprend que son adversaire a battu en retraite, il décide
de le suivre et fait prendre position à son armée dans le village
de Bondues, à mi-chemin entre Lille et Courtrai. Le comte de Flandre
est là, tout près, sur l'autre rive de la petite rivière
qui sépare les deux camps. Pour emporter la décision, il ne faut
pas tarder à entrer en action. Mais une pluie continue et très
dense s'abat sur le pays, transformant la terre en un bourbier d'où les
forces françaises, postées dans un endroit marécageux,
ne peuvent bientôt plus s'extirper. Elles sont comme enlisées.
Au point que trente chevaux suffisent à peine pour déplacer et
traîner un tonneau de vin! Les fantassins pataugent dans la boue et sont
incapables de riposter aux multiples opérations de harcèlement
des Flamands. Le roi se rend compte que son armée est en danger : le
ravitaillement devient pratiquement impossible, si bien que la famine menace
et, par leur immobilisme, les troupes sont dangereusement exposées.
A son grand dépit, Louis X se résout à
ordonner la retraite. Les bagages sont faits tristement, puis chacun essaie
de se débrouiller pour s'extraire le plus vite possible du piège
de cette gangue boueuse. Certains tentent de remonter à cheval, mais,
désarçonnés, sont incapables de se relever. Les premiers
à partir n'attendent pas les retardataires, trop pressés de quitter
ce lieu maudit. Les soldats français lèvent le camp durant la
nuit, brûlant les tentes et les bagages qu'ils ne peuvent pas emporter.
De retour à Paris, ils font piteuse figure, "dolents
et courroucés, mouillés et crottés", rapporte
la Chronique de Saint Denis.
Cette malheureuse aventure nuit considérablement
à la réputation de Louis X. Certes Philippe le Bel était
connu pour sa dureté; mais il savait éviter l'affrontement armé
et conduire d'habiles négociations. Son successeur est considéré
comme n'ayant hérité d'aucune de ses qualités : non seulement
il a subi un humiliant échec militaire, mais il n'a pas tenté
de régler le litige en ouvrant des pourparlers. Il n'aura le temps ni
de redorer son blason ni de prendre sa revanche : il mourra le 4 juin 1316.
A la suite des problèmes soulevés par sa succession, les hostilités
seront quelque temps suspendues.
De leur côté, les Flamands
sont épuisés par une guerre qui dure depuis plus de vingt ans.
Mais ils ne souhaitent pas que le comte Robert de Béthune cède
sur les trois villes litigieuses (Lille, Douai, Orchies), tout en lui reprochant
son imprudence et son manque d'habileté diplomatique : "Nous
n'aurions pas été si maladroits que de nous fier aux promesses
du roi et de ses conseillers, disaient les bourgeois. Il
n'y a que les Grands qui se laissent ainsi circonvenir et cajoler".
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