LES CAPETIENS
PHILIPPE AUGUSTE,
LES ARTS ET LES SCIENCES
LE LOUVRE DE PHILIPPE AUGUSTE
L'édification de la forteresse du Louvre commence en 1190. Ordonnée par Philippe Auguste, qui en supervisera lui-même chaque étape, sa construction vise à renforcer un point vulnérable de la toute nouvelle muraille qui s'élève autour de Paris. Il va falloir une douzaine d'années pour mener à bien les travaux d'une forteresse qui, après bien des remaniements successifs, deviendra la résidence parisienne des rois de France.
La puissance du Louvre n'est plus à prouver. Voilà quelques années que les travaux sont terminés et la seule contemplation de son puissant donjon de 32 mètres suffit à imposer la crainte à qui oserait encore porter le siège devant Paris. Philippe Auguste le sait bien. C'est pour cette raison qu'il y fait déposer ses archives et ses trésors, qui y seront abrités avec le garde-meubles, jusqu'à François 1er. De longues années ont été nécessaires à la reconstitution des documents diplomatiques royaux sottement perdus lors de la débâcle de Fréteval en 1194. Et un roi sans archives, sans trace des traités conclus avec ses alliés et ses vassaux, sans livres de comptes, ne peut faire valoir son autorité. Derrière les lourdes portes du donjon, tout cela est à l'abri, protégé aussi bien des ennemis extérieurs que d'un éventuel mouvement d'humeur des Parisiens prompts à effacer leurs dettes par le feu.
On ignore tout de l'origine du nom
Louvre. En 1189, une bulle nomme l'emplacement "louvrea" et le mot
Louvre apparaît pour la première fois dans une charte de 1198. On a longtemps pensé
qu'une tour forte normande ou "lower" s'élevait jadis en ces lieux et
aurait laissé son nom. Les fouilles récentes ont montré qu'il n'en est rien. Et on ne
sait pas plus si une "louveterie" eut à jouer un rôle étymologique.
La construction du donjon du Louvre s'inscrit dans le processus de fortification de Paris
entrepris par Philippe Auguste dix ans plus tôt avec l'érection de l'enceinte destinée
à protéger la capitale. Bastion isolé mais solidaire de l'ensemble, le Louvre s'avance
comme la proue d'un navire vers le couchant d'où sont, par le passé, venues les
invasions. On garde en mémoire la silhouette des drakkars remontant la Seine pour porter
la désolation jusque dans la Cité. Aujourd'hui encore, les Anglais sont à moins de cent
kilomètres à l'ouest des portes de Paris. C'est dans cette direction que doit se porter l'effort
défensif et être renforcée la surveillance des voies terrestres et fluviales.
Conscient de l'importance d'un tel ouvrage, Philippe Auguste n'hésite pas à le payer de
ses propres deniers. Il en contrôle lui-même l'exécution. Le Louvre, qui bénéficie
des toutes dernières techniques en matière d'architecture militaire, doit aussi, par son
apparence, refléter la puissance et la détermination de la monarchie capétienne.
Accotée aux remparts au niveau de la
tour du Coin, la forteresse présente un plan rectangulaire de 78 sur 72 mètres. Elle
compte dix tours. Une à chaque angle, une au nord, une à l'ouest et deux tours jumelles
sur les flancs sud et est gardant par deux l'accès à une porte. Les côtés sud et ouest
de cette courtine sont renforcés de bâtiments destinés à abriter les garnisons et les
arsenaux. L'ensemble est entouré d'un fossé large d'une dizaine de mètres à sa base.
La grosse tour du donjon trône au centre de cette mini-enceinte dont elle est isolée par
un fossé annulaire de neuf mètres de large et profond de six mètres. Haute de 32 mètres,
elle est coiffée d'un toit conique. Elle a un diamètre de 15 mètres et des murs épais
de 4,20 mètres. Ses trois étages voûtés sont reliés par un escalier de pierre à vis.
Comme tout donjon, la tour se suffit à elle-même en cas de siège. Elle dispose d'un
puits, d'une citerne et même d'une chapelle. La lourde porte qui la ferme peut être
interdite aux envahisseurs en relevant un long pont-levis commandé depuis le donjon.
Les miniatures du manuscrit des Très Riches Heures du Duc de Berry donnent une idée
assez précise de l'aspect du Louvre à la fin du XIIème siècle. Bien que ce document
fut rédigé après que Charles V eut fait procéder à quelques aménagements afin de le
rendre habitable, il est possible de se rendre compte de la magnificence de l'imposant
édifice. On comprend alors pourquoi, après avoir perdu sa vocation militaire, le Louvre
s'est imposé au fil des siècles comme résidence des rois de France.
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