LA TREVE DE NICE : FRANCOIS 1ER MAITRE DE LA SAVOIE (18 juin 1538)
L'invasion de la
Savoie et du Piémont par la France, en 1536, a provoqué une nouvelle guerre
entre François 1er et Charles Quint. Le pape Paul III réunit les deux rivaux
à Nice, en juin 1538, pour faire la paix. il obtient une trêve de dix ans
pendant laquelle François 1er pourra rester maître de ses conquêtes.
La mort du dernier
héritier légitime des Sforza, en novembre 1535, rouvre brusquement la question
de Milan. François 1er n'a jamais renoncé au duché qu'il revendique comme "son
héritage légitime" pour
son second fils, Henri d'Orléans, le futur Henri II. Charles Quint n'a nulle
envie de lâcher le Milanais et gagne du temps en proposant de donner
l'investiture de cette terre d'Empire au troisième fils du roi de France,
Charles d'Angoulême. Mais François 1er reste sur ses positions. Pourtant,
ce n'est pas contre l'Empereur mais contre Charles
III de Savoie, demi-frère de sa défunte mère Louise, que François 1er ouvre
les hostilités. il espère ainsi contrôler les cols des Alpes vers l'Italie.
Porte ouverte sur la Lombardie, les États de Savoie pourraient servir de
monnaie d'échange. Le roi a un bon prétexte pour s'en prendre à son oncle. Il
lui réclame la part d'héritage que Louise aurait dû recevoir à la mort de
son père, le duc Philippe, comte de Bresse. Sa mère ne s'en est jamais souciée,
mais François 1er exige les terres bressanes.
Le 14 janvier 1536, le roi s'installe à Lyon avec le Conseil, la Cour et une
armée forte de 40 000 hommes. De là, il suivra les opérations. En quelques
semaines, la Bresse, le Bugey puis la Savoie sont envahis. Les Français
franchissent les Alpes et occupent le Piémont. Le malheureux duc Charles ne
tient plus que le comté de Nice. Début avril 1536, les troupes royales ont
fait leur entrée à Turin et sont aux portes du Milanais. Pourtant le roi donne
l'ordre de s'arrêter. Il ne souhaite pas passer pour l'agresseur dans un
conflit à l'issue incertaine. Mieux vaut obtenir le duché de Milan par la
négociation.
Charles Quint a
très mal pris l'invasion de la Savoie. Il y voit un affront personnel, car
Charles III est aussi son beau-frère par alliance. De passage à Rome, il
dresse, le 18 avril, un long réquisitoire contre le roi de France devant le
pape Paul III et exige le retrait immédiat des troupes françaises. Une
nouvelle guerre semble inéluctable. Pour l'éviter, l'Empereur propose de
rencontrer le roi en combat singulier, à l'épée ou au poignard ! Le 2 juin,
après quelques semaines de vaines discussions, l'ambassadeur impérial est
renvoyé de France. C'est la guerre.
Le 25 juillet, Charles Quint envahit la Provence sans rencontrer la moindre
résistance. Les Français ont eu recours à la tactique de la terre brûlée et
attendent l'ennemi dans la plaine du comtat Venaissin. L'Empereur n'ira pas
jusque-là. Si, le 10 août, à Aix, il se proclame roi d'Arles et comte de
Provence, un mois plus tard, il doit battre piteusement en retraite. Son armée
est vaincue par les terribles ennemis que sont la faim, la soif et la
dysenterie.
La campagne de 1537 ne modifie pas le rapport de forces. La guerre s'essouffle.
A la fin de l'année, les deux rivaux concluent une trêve de trois mois qui sera
prolongée. Pendant ce temps, François 1er installe des officiers royaux en Savoie
et en Piémont. L'occupation prend toutes les allures d'une annexion.
Le pape Paul III
plaide pour la paix et prend l'initiative de réunir à Nice, en juin 1538, le
roi et l'empereur. Le duc Charles de Savoie a refusé de prêter son château
pour la rencontre, car c'est sa dernière place forte. Le pape s'installe au
couvent de Sainte-Croix. Le roi et la reine Éléonore, la soeur de Charles Quint
qu'il a épousée huit ans plus tôt, résident au château de Villeneuve. L'empereur
a préféré rester à bord de sa galère.
Les deux beaux-frères, qui ne se sont pas revus depuis la captivité de
François 1er, à la suite de la défaite de Pavie, douze ans plus tôt, refusent
de se rencontrer. Le pape va de l'un à l'autre, jouant les intermédiaires. On
aboutit cependant à un compromis. Le roi garde la Bresse, le Bugey, la Savoie
et les deux tiers du Piémont, le dernier tiers revient à l'Empereur qui
conserve le Milanais. L'accord se matérialise le 18 juin, non par un traité de
paix, mais par une trêve de dix ans. Le pape espère que "durant
ledit temps, les inimitiés enracinées dedans leurs coeurs se pourraient
mitiger finalement".
Quelques jours plus tard, Charles Quint propose une rencontre au sommet,
celle-là même qu'il a obstinément refusée. Le 14 juillet, à Aigues Mortes,
les deux souverains s'embrassent, fraternisent, échangent collier de la Toison
d'or contre ordre de Saint Michel. Sont-ils sincères ou se jouent-ils la
comédie de l'amitié? En tout cas, cette réconciliation se fait sur le dos du
malheureux Charles III, grand oublié des accords de Nice. La Maison de Savoie
ne se verra restituer ses domaines qu'en 1559, par le traité du
Cateau-Cambrésis.
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