LES MEROVINGIENS

LES PRECURSEURS DE CLOVIS, CLODION LE CHEVELU

 

CLODION LE CHEVELU

Du premier roi connu de ce qui deviendra la dynastie des Mérovingiens, on ne sait presque rien, pas même son nom puisque Clodion est un surnom sympathique donné par ses guerriers, peut-être à cause d'une légère claudication. Quant à chevelu, ce n'est pas un signe particulier, mais la marque la plus évidente de sa supériorité de roi des Francs.

Pour les Francs, leurs rois descendent des dieux qui régissent le monde visible et invisible, et cette marque divine se traduit par une marque physique indiscutable : la chevelure intacte. Alors que les guerriers se rasent la nuque, les fils des dieux portent les cheveux naturellement longs. Les lourdes boucles blondes qui cascadent sur leurs épaules ne sont cachées que par le casque quand sonne l'heure du combat. Cette crinière de lion est le diadème des dieux et des fils des dieux qui, seuls, sont aptes à gouverner les mortels. Cette croyance extrêmement puissante les rend sourds aux prédicateurs chrétiens, car devenir chrétien ce serait renier ses ancêtres et détruire tout ce qui donne sa cohésion à la communauté franque. Lorsque Clovis décidera de se faire baptiser vers 496, les évêques salueront son courage. Mais Clovis devra prendre la précaution de commencer la généalogie des Francs par lui-même, éliminant son grand père Mérovée et le fameux Clodion le chevelu qui inaugure, pour l'Histoire, la première famille des rois de France. Cette toute puissance de la chevelure considérée comme un sceptre, persistera puisque, pour s'assurer de la disparition politique définitive du dernier mérovingien, Childéric III, Pépin le fera tondre en 751, avant de l'enfermer dans un couvent. Plus jamais il ne pourra être roi.

Ce que l'on sait sur le règne de Clodion, c'est qu'il a su profiter des circonstances avec perspicacité et sang froid. L'autorité de Rome n'arrive même plus jusqu'à la Loire et le préfet des Gaules s'est retiré en Arles où il se bat contre les Wisigoths et les Vandales. Clodion en profite pour s'installer dans ce qui est aujourd'hui le nord de la France. En une seule bataille il s'impose et Tournai se rend, peut-être entre 431 et 451. Le fait politique marquant est que les Francs, installés sur les deux rives du Rhin, commencent leur grande migration vers le sud. Le premier historien de la dynastie dit : "Toujours leurs désirs et leurs rêves les portaient vers le Sud, où le ciel plus clément faisait tomber en abondance dans la main de l'agriculteur les fruits qu'il fallait arracher au sol de leur patrie. C'est là, derrière les murailles des vieilles villes opulentes, qu'on trouverait de l'or rouge et la riche vaisselle..."

Après Tournai, capitale régionale de la rive droite de l'Escaut aux portes des riches plaines flamandes, Clodion éparpille la petite armée gallo-romaine qui, pour défendre Cambrai, a pris position devant les marécages servant de fortifications naturelles. Clodion ne rase pas la ville, il veut s'en servir, et les murailles protégeront ses trésors. Ce n'est pas une nouvelle invasion, mais une prise de possession d'un nouveau domaine. Tournai et Cambrai gardent les populations romanisées. Clodion poursuit sa marche jusqu'à la mer, mais il trouve sur sa route celui que l'on a appelé le "dernier des Romains", Aetius. Ce général romain sera pendant vingt ans le principal personnage de l'Occident.
Une nuit, Aetius surprend l'avant garde des Francs qui ripaille au bord de la Canche, près de qui est aujourd'hui Hesdin dans le Pas de Calais. Auprès du pont qu'emprunte la voie romaine, les Francs ont installé les chariots en cercle. A l'abri de cette fortification, les soldats, qui célèbrent le mariage d'un chef, se passent des coupes d'hydromel et de cervoise. Les légionnaires d'Aetius les encerclent, le pont est coupé, les convives enivrés fuient dans la nuit. Ce n'est pas une bataille, mais une embuscade sans vraie conséquence. Ce qui importe, c'est que l'ère de Clodion le chevelu marque la fin des migrations des Francs. Désormais la nation franque est installée.

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