CESAR BORGIA, LE FILS DU PAPE, EST FAIT DUC DE VALENTINOIS
Pour se débarrasser de sa première femme, Jeanne
la Boiteuse, et épouser Anne de Bretagne, la veuve de Charles VIII, Louis
XII a besoin du soutien du Saint Siège. En échange de la bienveillance
du pape Alexandre VI, il confère une principauté à son
fils César Borgia et l'unit à Charlotte d'Albret, soeur du roi
de Navarre.
Sitôt monté sur le trône après
la mort de Charles VIII, le 7 avril 1498, Louis XII a notifié son avènement
au pape Alexandre VI. Il lui a également fait part de ses revendications
sur le duché de Milan, fief de ses ancêtres Visconti, et sur le
royaume de Naples, hérité de son prédécesseur. S'il
a besoin du Saint Père pour rentrer dans ses biens italiens, il compte
aussi sur lui pour arranger ses affaires matrimoniales.
En 1476, alors jeune duc d'Orléans de quatorze ans, il s'est vu contraint par
Louis XI d'épouser Jeanne, sa fille difforme. Aujourd'hui, il est roi
et veut que ce mariage "forcé" soit annulé afin de pouvoir
épouser la veuve de Charles VIII, Anne de Bretagne, ce qui éviterait
la perte du beau duché. Reste à obtenir de Rome l'annulation de
sa première union et les dispenses nécessaires pour se lier à
la veuve de son cousin. Alexandre VI semble disposé à s'entendre
avec le nouveau roi de France. En mai 1498, il a refusé d'entrer dans
une ligue anti-française que Maximilien d'Autriche a tenté de
constituer avec Milan et Naples. Le conjoncture est propice à un marchandage
dans lequel le souverain pontife a également un intérêt
personnel à faire valoir...
Alexandre VI a plusieurs enfants naturels qu'il a reconnus. La belle Lucrèce
et l'inquiétant César, notamment. Il a assuré à
ce dernier une brillante et fulgurante carrière ecclésiastique,
en le faisant cardinal de Valence, en Espagne. Cependant, le jeune homme a d'autres
ambitions. A vingt trois ans, il souhaite faire un beau mariage et rêve d'un avenir
princier. Il a jeté son dévolu sur la fille du roi de Naples,
Charlotte, dont on sait qu'elle recevra en dot l'opulente ville de Tarente.
Mais ses avances se sont jusqu'ici heurtées à un refus poli des
Napolitains. La princesse étant élevée à la Cour
de France parmi les filles d'honneur d'Anne de Bretagne, Louis XII promet de
s'entremettre. Il octroiera en outre au bâtard du pape une principauté
et de très confortables revenus.
Le 29 juillet 1498, Alexandre VI constitue un tribunal qui doit instruire le
procès en annulation du mariage du roi en procédant, en France,
à l'audition des parties. Aussitôt, par lettres patentes, Louis
XII cède à César Borgia, qu'il fait duc de Valentinois,
les comtés de Valence et de Die, dans le Dauphiné, ainsi que la
seigneurie et châtellerie d'Issoudun, dans le Berry, avec son grenier
à sel, le tout assurant 20 000 livres de revenus.
Le chambellan royal, chargé de notifier au nouveau duc de Valentinois
son titre et sa dotation, arrive à Rome au moment où celui-ci
est rendu à la vie laïque. Le 17 août, César Borgia,
qui n'a reçu que les ordres mineurs, est délié de ses voeux
par son père. Il abandonne sa grande cape cardinalice et ses bénéfices
ecclésiastiques pour une nouvelle carrière. Le 1er octobre, le
duc de Valentinois part pour la France avec un lot de bulles pontificales, notamment
celle qui dispense Louis XII et Anne de Bretagne des empêchements canoniques
résultant de leurs liens de parenté. Son train somptueux digne
d'un prince (son père lui a donné les moyens d'éblouir
les Français) et le faste des réceptions défraient la chronique
autant que le procès en cours pour l'annulation du mariage du roi. César
Borgia attend le verdict du tribunal avant de rencontrer Louis XII et de lui
remettre la précieuse dispense papale. Avec des juges ecclésiastiques
choisis pour leur sens de l'opportunité politique, l'issue du procès
ne fait aucun doute. Malgré une défense étonnamment pugnace
de la part de la douce Jeanne, le mariage est annulé pour non-consommation.
La sentence est prononcée le 17 décembre 1498. Le jour même,
César Borgia est aux portes de Chinon, où réside le roi.
Le 8 janvier, Louis XII épouse Anne de Bretagne.
Alexandre VI ayant rempli sa part du "contrat" reste au roi
à s'acquitter de la sienne : le mariage du duc de Valentinois avec Charlotte.
Mais, comme son père, la princesse napolitaine ne veut toujours pas d'une
union avec l'ex-prélat et bâtard du pape. Louis XII propose alors
à César Borgia sa propre nièce, la fille de Jean de Foix.
Mais celle-ci refuse. Alain d'Albret, duc de Guyenne, tire le roi de cette situation
embarrassante en offrant la main de sa fille, Charlotte. Soeur cadette de Jean,
roi de Navarre, et demoiselle d'honneur d'Anne de Bretagne, qui l'a élevée
à la Cour de France, c'est un beau parti. Le mariage est célébré
à Blois le 12 mai 1499. Les époux sont satisfaits l'un de l'autre.
Louis XII, en prévision de ses prochaines expéditions en Italie,
est ravi d'avoir ainsi pu s'attirer le soutien du pape.
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