LES CAPETIENS
PHILIPPE III LE HARDI, SA VIE

 

LA MORT DE LA REINE ISABELLE D'ARAGON

La reine Isabelle d'Aragon a tenu à suivre Philippe III le Hardi, son époux qu'elle aime profondément, lors de la huitième croisade. Au retour de cette expédition (qui a déjà vu la mort du roi Louis IX et de plusieurs princes), elle va être victime d'une grave chute de cheval et décèdera le 30 janvier 1271.

La huitième croisade s'est terminée tristement par la mort du pieux roi Louis IX devant les remparts de Tunis. Devenu souverain dans ces pénibles circonstances, Philippe le Hardi, "couvert de deuil, après tant de dépenses et de travaux, ne rapporte en France que des coffres vides et des cercueils pleins d'ossements". Au cours du voyage de retour, il va avoir de surcroît le malheur de perdre son épouse, Isabelle d'Aragon, qui mourra à l'âge d'environ vingt huit ans à Cosenza, en Calabre, le 30 janvier 1271. Décédée brutalement, la reine sera regrettée de tous, grands seigneurs et gens du peuple, autant pour sa douceur et sa piété que pour sa fécondité : elle a donné à son époux quatre fils, dont le deuxième va régner sous le nom de Philippe IV le Bel.

Fille puînée du roi Jacques 1er d'Aragon et de sa seconde femme Yolande de Hongrie, Isabelle est arrivée à la Cour de France sous les meilleurs auspices : son union avec l'héritier de la Couronne, le futur Philippe le Hardi, est le gage de la paix conclue entre son père et Louis IX. Mariée au prince capétien à l'âge de dix neuf ans, à la Pentecôte 1262, elle a immédiatement émerveillé le peuple par sa beauté espagnole. Les Grands l'ont accueillie avec transport, se souvenant de Blanche de Castille, qui quelques années auparavant a honoré le trône de France de son génie personnel et de sa piété. Mais Isabelle d'Aragon n'aura pas le temps de suivre les traces de la mère de Louis IX.
En 1270, lorsque le prince Philippe prend la croix, à l'instar de son père et de ses deux frères, Jean Tristan, comte de Nevers et Pierre, comte d'Alençon et du Perche, ainsi que d'un grand nombre de barons et de chevaliers, Isabelle jure de l'accompagner. Soutenue par l'affection très vive qu'elle porte à son époux et par une foi intense qui se manifeste par maintes oeuvres de charité, la jeune femme affronte avec courage les difficultés et les fatigues de cette lointaine expédition. Pourtant, aucun malheur n'épargne les croisés, à commencer par la peste, qui emporte le prince Jean Tristan, puis le roi, et à laquelle le prince Philippe survit presque par miracle. Elle endure ses souffrances en silence, sans jamais se plaindre ni en être autrement effrayée, alors "que bien des croisés auraient souhaité suivre en paradis le saint roi", rapporte un chroniqueur. Lorsque son époux décide de renoncer à cette désolante croisade et de rentrer en France, elle se sent infiniment soulagée : bientôt ses épreuves seront finies...

Lors du voyage de retour, les navires qui transportent l'armée des croisés font voile sur la Sicile, royaume de Charles d'Anjou, frère du défunt Louis IX. Il est convenu qu'on se reposera au port de Trapani et que là on se divisera en trois armées : l'une rentrera en France sous la conduite de Philippe le Hardi, tandis que les deux autres se dirigeront vers l'Orient. Mais une tempête effroyable comme la Méditerranée en connaît pendant les mois d'hiver surprend la flotte, et plusieurs vaisseaux sombrent en vue des côtes. La nef royale ne gagne qu'avec peine le rivage. Pour la reine Isabelle, enceinte de son cinquième enfant, cette traversée mouvementée a été particulièrement pénible, surtout à cause du froid.
Au début de l'année 1271, après avoir franchi le détroit de Messine, l'armée débarque dans la Péninsule et se met en route pour l'Italie du Nord. Mais en Calabre, près de la ville de Cosenza, "comme madame Isabeau d'Aragon passait un fleuve à gué, le cheval qu'elle montait la heurta si fort qu'elle trébucha et se blessa grièvement, lors étant enceinte de six mois", rapporte le chroniqueur Guillaume de Nangis. Le "fleuve" n'est qu'un ruisseau en crue, mais la chute n'en est pas moins rude. A la suite de cet accident, la reine accouche prématurément d'un enfant qui ne survit pas. Epuisée, atteinte de fièvre puerpérale, ele lutte plusieurs jours contre la mort, mais finit par rendre l'âme le 30 janvier.
Tandis que le roi Philippe est accablé de chagrin, on donne au coeur de la défunte une sépulture dans la cathédrale de Cosenza. "Le roi et les barons, après avoir célébré un service pour la reine avec moult grande dévotion, cheminèrent tristement jusqu'à Rome, conduisant avec eux les cinq cercueils du roi Louis, du roi Thibaud de Navarre, de le reine Isabeau de France, du comte de Nevers et de l'enfançon royal, mort avec sa mère en naissant", relate Guillaume de Nangis. Le 22 mai, un service funèbre est célébré à la cathédrale Notre Dame de Paris pour le feu roi "et pour les autres qui étaient trépassés en la route".

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