LES CAPETIENS
LOUIS VII LE JEUNE, CHEF DE
GUERRE
La seconde croisade (Noël 1145-Pâques 1147)
DE SAINT DENIS A CONSTANTINOPLE
Le 11 juin 1147, Louis VII et l'armée des croisés quittent Saint Denis pour la Terre Sainte. Quelque trois mois plus tard, au terme d'une longue et pénible traversée de l'Empire, ils atteignent Constantinople, qui leur réserve bien des surprises!
Conformémént à la tradition désormais établie,
avant de partir en guerre Louis VII se rend à l'abbatiale de Saint Denis. Sous
les acclamations de la foule, il se prosterne devant les reliques, puis s'empare
de la bannière rouge et or de l'ost royal. Le pape Eugène III, venu spécialement
pour la circonstance, lui remet la besace et le bâton de pélerin. Car, le roi
n'est pas seulement le chef militaire de la deuxième croisade, il est aussi
désireux de faire pénitence et d'oeuvrer pour le salut de son âme.
Le cortège
royal quitte Saint Denis le 11 juin 1147. La reine Aliénor d'Aquitaine chevauche
au côté de son époux. Elle est accompagnée par plusieurs chambrières et a réquisitionné
maints chariots pour le transport de ses "bagages" : une garde-robe
fournie, des coffrets remplis de bijoux, quantité de fourrures et de tapis.
La colonne des croisés s'étire en une longue procession bigarrée et disparate.
Sa première étape est Metz, en terre d'Empire, point de ralliement de tous les
chevaliers et pélerins du royaume.
Escorté par les comtes de Dreux, de Soissons,
de Toulouse et de Flandre, le roi prend la tête de l'armée, maintenant au complet,
qui s'ébranle vers l'est. Dès la traversée du Rhin, à Worms, des rixes éclatent
avec la population allemande. A Ratisbonne, sur le Danube, les croisés trouvent,
comme prévu, des bateaux prêts à leur faire descendre le fleuve vers la Hongrie
puis les Balkans. Mais les espoirs de Bernard de Clairvaux, qui a prêché la
croisade avec des trésors d'éloquence, sont vite déçus. Lors de cette première
expédition commune, Allemands et Français semblent peu désireux à coopérer et
à garantir ainsi le succès de cette pieuse entreprise. Leurs relations sont
entachées par une vive antipathie réciproque. Au point que les Allemands précèdent
les Français de quelques semaines. Après leur passage, il est difficile de se
ravitailler, en particulier dans les riches régions de l'actuelle Bulgarie,
qu'ils ont dévastées, se montrant sans pitié pour les paysans qui tentaient
de se soustraire aux réquisitions. A Plovdiv, des faubourgs sont détruits par
un incendie allumé un soir de beuverie, et dans le nord de la Grèce de telles
scènes barbares se reproduisent fréquemment.
A leur arrivée à Andrinople
(actuelle Edirne), les croisés français manquent cruellement de vivres. Ils
sont accueillis par des envoyés du basileus Manuel 1er Comnène, qui, échaudés
par les ravages causés par les Allemands, tentent de dissuader Louis VII de
marcher sur Constantinople.
L'Empereur d'Orient se méfie du Capétien,
qu'il sait en relation avec son ennemi le roi Roger II de Sicile. Non seulement
voir bivouaquer la puissante armée sous les murs de sa capitale l'effraye, mais
il n'a rien à gagner dans l'affaire : il ne pourra pas bénéficier des conquêtes
des croisés en Palestine et les anciennes possessions de l'Empire byzantin ne
seront pas restituées. Même s'il ne s'agit que de pourvoir au ravitaillement,
il est réticent à apporter son aide.
Comme Conrad III avant lui, Louis VII
refuse d'obtempérer. Il n'est qu'à un jour de marche de Constantinople, quand
il apprend avec stupeur que Manuel 1er Comnène vient de conclure un traité avec
le sultan turc de Konya, dont les croisés devront traverser les terres pour
rejoindre le royaume de Jérusalem. L'évêque de Langres et quelques clercs violemment
hostiles aux chrétiens d'Orient suggèrent de lancer une expédition punitive.
Le roi s'y refuse, mais, le 4 octobre, donne l'ordre à ses troupes de dresser
le camp sous les murs de Constantinople. Les croisés y restent une bonne dizaine
de jours. Affolée, une délégation vient supplier Louis VII de ne pas se montrer
hostile, de bien vouloir négocier avec le basileus qui, selon Eudes de Deuil,
"prodigua les marques de la plus vive
amitié". Finalement, on convient d'un arrangement
: les Français ne rendront pas les possessions de l'Empire byzantin, mais s'engagent
à n'attaquer aucune ville relevant de sa juridiction. En échange, ils recevront
vivres et guides pour les escorter. L'armée de Saint Denis peut poursuivre sa
route vers la Terre Sainte.
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