LES CAPETIENS
PHILIPPE 1ER, CHEF D'ETAT

 

LE PAPE PASCAL II SE REFUGIE EN FRANCE
(30 AVRIL 1107)

Alors que la "querelle des investitures" l'oppose à l'Empereur, le pape Pascal II est contraint de se réfugier en France. Le 30 avril 1107, à l'abbaye de Saint Denis, il rencontre le roi Philippe 1er et son fils, le futur Louis VI, dont il espère obtenir le soutien.

Depuis 1073 et le pontificat de Grégoire VII, la réforme "grégorienne" a secoué tout l'Occident : la volonté de moraliser le clergé et de le libérer de la tutelle féodale bouleverse l'organisation de la société. Le Saint Empire romain germanique est particulièrement hostile à cette réforme qui veut mettre un terme à l'investiture laïque, par laquelle les souverains, en tant que seigneurs féodaux, nomment les abbés et les évêques. L'affrontement entre Grégoire VII et l'Empereur Henri IV va donner lieu à une "querelle des investitures" qui ne prendra fin qu'en 1122, avec le concile de Worms.
Le 13 août 1099, Pascal II a été élu pape à l'unanimité. Né à Bedia, en Italie, en 1060, il est entré tout jeune dans un monastère bénédictin. Bien que Guibert de Nogent lui reproche une formation intellectuelle insuffisante, son habileté administrative a été remarquée très tôt : à dix neuf ans, il a été chargé de suivre les affaires de son monastère à la curie romaine. Il a été nommé abbé de Saint Laurent hors les Murs par Grégoire VII, puis vers 1078, cardinal-prêtre de Saint Clément. Il a embrassé les idéaux de la réforme grégorienne, mais fait figure de modéré, partisan d'une conciliation avec le pouvoir temporel. S'il fait preuve d'un désintéressement personnel et d'une grande foi religieuse, Pascal II montre peu d'ardeur et de continuité dans sa conduite. En France, ses légats, Richard d'Albano et Lambert d'Arras, ont donné l'absolution au Capétien Philippe 1er et l'ont réconcilié solennellement avec l'Eglise au concile de Paris, en 1103 : le roi de France a juré de cesser toute relation avec sa maîtresse, Bertrade de Montfort.

En 1107, la querelle qui oppose l'Empereur au Saint Siège s'est envenimée. Henri V est devenu une menace pour Pascal II, qui l'a pourtant soutenu contre son père Henri IV. Aussi le pape se rend-il en France pour y trouver refuge et y obtenir l'appui de Philippe 1er et du futur Louis VI. Après avoir fait étape à l'abbaye de Cluny, il est reçu le 30 avril à Saint Denis par le Capétien et son fils, "qui humilièrent à ses pieds la majesté royale, comme les princes ont coutume de le faire, en se prosternant et en abaissant leurs diadèmes devant le tombeau du pécheur Pierre", rapporte l'abbé Suger. Le 3 mai, il est à Chalons sur Marne, où il doit rencontrer les envoyés d'Henri V. Le 23 mai, Pascal II convoque un concile à Troyes. Là, entouré de tout le clergé français, il lance de nouveau l'anathème contre l'Empereur et renouvelle les décrets de la réforme; toute personne ayant été introduite par un laïc dans un office ecclésiastique perd sa dignité et est excommuniée, ainsi que l'auteur de l'investiture. C'est un tournant capitale de la politique du pape, qui juge opportun de renoncer à combattre la dynastie capétienne et de s'en faire une alliée, un point d'appui solide contre la violence des impériaux et des Italiens. Dans les moments de crise, il peut ainsi se transporter en France et y installer la curie, sans craindre ses ennemis, qu'il foudroie inpunément.

Alors que la France devient peu à peu "la fille aînée de l'Eglise", la question des iinvestitures se résout d'elle-même dans le royaume, sans traité formel. Philippe 1er ne pratique plus l'investiture spirituelle et cesse de recevoir l'hommage féodal des évêques. Cela ne veut évidemment pas dire qu'il renonce à toute ingérence et à tout profit dans la nomination des prélats, mais le principe restant intact et les apparences sauves, Pascal II se déclare satisfait et réserve ses anathèmes à Henri V.
En 1111, devant une nouvelle invasion des troupes impériales en Italie et des scènes de meurtre à l'église Saint Pierre ainsi que dans les rues de Rome, Pascal II se laisse arracher par l'Empereur le droit "d'investir par la crosse et l'anneau". Ce démenti à la politique menée depuis cinquante ans par le Saint Siège scandalise le clergé français. La faiblesse du pape est condamnée sans ménagement par l'abbé Geoffroy de Vendôme et par l'archevêque Gui de Vienne, qui brigue le trône pontifical. Les plus virulents des réformistes français obligent le souverain pontife à revenir sur ses concessions et orientent des conciles, comme celui de Vienne en 1112, où ils usent contre Henri V des armes spirituelles. Pascal II ne reviendra à Rome que pour y mourir, le 21 janvier 1118, au château Saint Ange. Gui de Vienne lui succédera sous le nom de Calixte II et, après l'avoir désavouée, poursuivra sa politique de conciliation.

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