LES CAPETIENS
LOUIS IX, LES ARTS ET LES SCIENCES

 

LE "ROMAN DE LA ROSE" DE GUILLAUME DE LORRIS

Composé par Guillaume de Lorris entre 1230 et 1245, le Roman de la Rose est un des ouvrages médiévaux les plus en vogue à son époque et le restera au cours des siècles suivants. Cet élégant poème allégorique, récit d'une quête amoureuse, porte à la perfection littéraire l'idéal de l'esprit courtois.

Le Roman de la Rose de Guillaume de Lorris a rencontré un grand succès en son temps et a largement influencé la littérature du XIVème siècle. Plus de trois cents manuscrits en ont été conservés. L'ouvrage a été remanié dès la fin du XIIIème siècle et mis en prose par des auteurs réputés. Dès les débuts de l'imprimerie, il a connu maintes éditions, dont l'une attribuée au poète de la Renaissance, Clément Marot.

Ce poème de quatre mille vers est divisé en plusieurs parties, dont chacune possède sa propre cohérence. Ayant pour auteur un certain Guillaume, originaire de Lorris, dans le Loiret, il est rédigé entre 1230 et 1245, à une époque où l'allégorie devient le mode d'expression le plus recherché dans les oeuvres littéraires morales et courtoises.
Le Roman de la Rose du Guillaume de Lorris représente l'un des exemples les plus achevés de la tradition courtoise. On y retrouve le thème de la contemplation, de l'admiration émerveillée devant le beauté des formes : "Et sachez que je cuidrai estre / Pour voir en paradis terrestre / Tant estoit li leus delitables". Cet ouvrage, modèle d'élégance dans les mots et les sentiments, pousse à l'extrême le raffinement aristocratique qui est l'un des éléments de l'esthétique courtoise, dont les canons de la "fin'amor" se retrouvent dans cet art d'aimer où figurent tous les codes de cette culture. Le poète narre un rêve qu'il a fait à vingt ans, affirmant que cette vision s'est réalisée par la suite. Dans ce songe, des idées, des valeurs, tel le danger ou la jalousie, sont personnifiées et prennent un aspect humain. L'objet de l'amour et du désir est une rose aperçue dans un verger, que le jeune homme tente d'approcher, puis de délivrer. Attente, espoir, audace, aveu, désir et souffrance.
La cueillette de la rose représente la conquête amoureuse; la fleur et son entourage symbolisent la dame aimée et ses réactions face à la demande amoureuse. Le château de Jalousie est la forteresse imprenable que constituent dans l'esprit de la dame et de ses proches la jalousie, mais aussi la médisance, la peur, la honte. Là se mobilisent les oppositions qu'il va falloir affronter quand un baiser déchaîne les forces hostiles... Mais cette partie logique et attendue, celle du siège et du combat, est absente de l'oeuvre, qui s'arrête avant cette phrase, sur les plaintes de l'amoureux malheureux.

Afin de mener à bien sa mise en scène, Guillaume de Lorris emprunte, comme d'autres de ses contemporains, la rhétorique du double sens venue de l'Antiquité tardive. Le verger est la représentation du monde aristocratique, l'itinéraire géographique fait figure d'initiation amoureuse. Le sens de ces allégories se perçoit souvent sans difficulté, ainsi la Convoitise a les mains crochues. D'habitude, lorsque la transposition devient plus subtile et que l'énigme constitue alors l'intérêt essentiel du texte, celui-ci s'étoffe d'un exposé explicatif; l'auteur ou une personnification (comme l'Amour, en général) effectue parfois lourdement, la transposition à la place du lecteur. Le créateur du Roman de la Rose, lui, évoque cete alternative sans accepter d'y recourir. L'allégorie ne cède jamais la place à une glose didactique, et les formes littéraires empruntées, les images, le récit romanesque trouvent à la fois une profondeur et une légèreté nouvelles. De ce fait, cette narration d'une expérience individuelle acquiert un aspect universel.
Ce livre atteint ainsi à l'expression parfaite de l'idéal courtois dans sa forme privilégiée, la poésie lyrique, et ce grand chant courtois est l'héritier de la canso occitane, avec des prédécesseurs illustres : Thibaut de Champagne, Blondel de Nesle, Le Châtelain de Coucy. C'est chez ces chantres de la poésie amoureuse que Guillaume de Lorris puise son vocabulaire de l'amour, ses métaphores, les noms de ses personnifications.
Par ailleurs, il bénéficie de l'apparition, vers le milieu du siècle précédent, des ouvrages narratifs en vers : si bien qu'il enrichit son oeuvre de leur merveilleux hétéroclite, de l'usage des descriptions et des objets comme emblèmes. C'est la combinaison nouvelle et l'aboutissement de tous ces matériaux qui confèrent au Roman de la Rose une originalité qui lui vaudra d'être loué par maints poètes de siècles suivants, comme Pierre de Ronsard sous la Renaissance.

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