LES CAPETIENS
PHILIPPE 1ER ET LES PERSONNALITES

 

EUDES DE LAGERY EST ELU PAPE SOUS LE NOM D'URBAIN II

Elu pape le 8 mars 1088, Urbain II, champenois issu de l'abbaye bourguignonne de Cluny, va poursuivre l'oeuvre réformatrice de Grégoire VII. Les onze années de son pontificat seront marquées par une lutte sans merci contre l'Empire. Mais il restera surtout dans l'Histoire comme celui qui a prêché et lancé la première croisade.

Le pape Grégoire VII est un ami de l'abbaye de Cluny, dans laquelle il met un grand espoir pour la rénovation spirituelle de la Chrétienté. Il entretient des liens très forts avec l'abbé Hugues de Semur, et c'est vers lui qu'il se tourne quand il a besoin d'hommes sûrs pour l'assister dans sa lutte contre la politique de l'Empereur Henri IV. A la mort de l'évêque d'Ostie, l'un des ses plus proches conseillers, il appelle à Rome pour le remplacer le prieur du monastère bourguignon. Eudes de Lagery (ou de Châtillon) est nommé évêque d'Ostie en 1078, puis cardinal. C'est pour lui le début d'une belle carrière.

Eudes de Lagery est champenois, né à Châtillon sur Marne, près d'Epernay, vers 1042. Son père, Eucher, petit seigneur qui possède quelques terres à Lagery, à Brinson et dans le sud de la Champagne, est vidame, c'est-à-dire qu'il administre les biens temporels de l'archevêque Gui de Châtillon, dont il est peut-être parent. Ils sont en tout cas assez proches pour qu'Eudes naisse dans le château du prélat. Le jeune garçon est très tôt destiné à une carrière eclésiastique. Il étudie à Reims, dont les écoles sont réputées, et où il a pour maître Bruno de Cologne, le futur fondateur de l'ordre des Chartreux. C'est sans doute grâce à Gui de Châtillon qu'il est pourvu d'un canonicat à la cathédrale et qu'il reçoit rapidement le sacerdoce. Devant son zèle et son intelligence, l'archevêque en fait son archidiacre, alors qu'il a treize ans à peine. Vers 1070, se sentant fait pour une vocation plus exigeante, Eudes entre à l'abbaye de Cluny, championne de la réforme monastique, où l'abbé Hugues le nomme prieur. Appelé par le pape, il va cependant devoir quitter Cluny et retourner dans le siècle.
Investi de la confiance de Grégoire VII, Eudes prend part, de près ou de loin, à maints événements importants. A la mort du pape, le 25 mai 1085, il fait partie des cardinaux qui ont été recommandés pour succéder au défunt. Mais c'est l'abbé Didier (ou Desiderio) du Mont Cassin qui est élu au trône pontifical sous le nom de Victor III. Celui-ci meurt peu après, le 16 septembre 1087, après avoir désigné Eudes comme son successeur. "Prenez-le et placez-le sur le siège de Rome", a-t-il conseillé aux prélats de son entourage en prenant la main de l'évêque d'Ostie. Malgré l'approbation totale du Sacré Collège, ce choix n'est entériné que six mois plus tard. Le 8 mars 1088, l'assemblée électorale se réunit enfin à Terracine, en Campanie. Là, Eudes de Lagery est élu à l'unanimité et devient pape sous le nom d'Urbain II. Il déclare aussitôt qu'il suivra les traces de Grégoire VII, dont il continuera l'oeuvre de réforme de l'Eglise.

Le pontificat d'Urbain II est troublé par les luttes opposant la papauté et l'Empire. L'empereur Henri IV nomme un antipape, Clément III. Mais, par son attitude modérée, Urbain II rallie les Romains à sa cause, et son rival est chassé de la ville éternelle. Malgré la faiblesse de sa position, il renoue avec le langage altier de Grégoire VII envers les souverains. Il excommunie ainsi le roi de France Philippe 1er, qui a répudié sa femme pour épouser Bertrade de Montfort, déjà mariée au comte d'Anjou. Mais ses grandes préoccupations restent d'ordre spirituel. Lors du concile de Clermont, en novembre 1095, il prêche la première croisade. Il accorde soutien et protection aux différentes réformes religieuses, ainsi qu'au renouveau de la règle de Saint Augustin. Il approuve la fondation de l'abbaye de Cîteaux. Il s'occupe en revanche moins des chartreux que de son ancien maître, Bruno de Cologne, qu'il appelle à Rome, contre son désir et aux dépens de l'ordre. Enfin, son vaste savoir théologique lui permet de soutenir la polémique relative au Saint Esprit contre les chrétiens d'Orient.
Urbain II rend son âme à Dieu le 29 juillet 1099, emporté en quelques heures par un mal inconnu, sans savoir que les croisés ont pris Jérusalem une dizaine de jours plus tôt. Ses funérailles sont une apothéose, et, par la suite, de nombreux miracles vont attester sa sainteté aux yeux des fidèles. Il sera béatifié en 1881. "Nous ne nous écarterons jamais de la voie tracée par notre prédécesseur Urbain II, homme de Dieu, pontife de sainte et bienheureuse mémoire", déclarera le pape Pasacal II au concile de Latran en 1112.

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