CLOVIS ET LE PEUPLE
QUI SONT LES FRANCS ?
Quel est ce peuple que Clovis entraîne derrière lui quand il se convertit à la religion chrétienne à Reims en 496 ? Si on sait peu de choses sur les origines de cette population formée de différentes tribus, les archives du Bas Empire romain d'Occident nous les montrent dès le IIIème siècle comme les conquérants minutieux d'un vaste territoire en Gaule Belgique.
Les circonstances de la
constitution du peuple franc sont mal connues. Le nom apparaît pour la première fois au IIème siècle pour désigner un regroupement de tribus germaniques qui a entrepris des
raids en territoire gaulois. Les Francs englobent alors différentes tribus : les
Ansivariens, les Bructères, les Chamaves, les Chattes, les Sicambres et les descendants
des Bataves. Sa signification, que nous livre la connaissance du vieux norrois frekkr,
serait "hardi" ou "courageux" et correspond à la réputation
guerrière des Francs. Quand aux raisons qui ont conduit ces différents peuples à se
réunir, elles restent méconnues.
Au sein de ce groupe hétérogène, il convient pourtant de distinguer deux sous ensembles à
partir du IVème siècle. Il y a les Francs Saliens qui occupent principalement le Nord
de la Gaule ; on retrouve ce qualificatif dans l'expression "loi salique",
c'est à dite la loi traditionnelle qui réglera les successions royales du royaume de
France sous les Mérovingiens. Il y a aussi les Francs du Rhin ainsi dénomnés par les
historiens modernes parce qu'ils résident dans la région de Cologne. Si les premiers
manifestent une organisation politique assez cohérente, les seconds forment plutôt un
agrégat de peuples non unifiés. Populations surtout préoccupées par la guerre, les
Francs sont des conquérants terriens même si certains participent aux côtés des Saxons
à la conquête maritime de la Grande Bretagne.
A la différence d'autres populations
venues d'Europe de l'Est, les Francs ne sont pas des envahisseurs brutaux dévastant tout
sur leur passage. Leur expansion territoriale se fait par une occupation de fait et par
l'intégration dans les communautés établies au sein desquelles leur bravoure leur
permet d'atteindre les plus hautes fonctions.
Imposant leur marque pendant deux siècles aux événements militaires de la Gaule
septentrionale, les soldats francs assimilent la culture romaine qu'ils découvrent. Aussi
apparaissent-ils rapidement comme des alliés utiles face aux autres Barbares dont les
moeurs sont plus grossières. Ils sont engagés dans les corps auxiliaires avant
d'être recrutés par l'armée de campagne elle-même. Dès Constantin, nombre de hauts
officiers sont d'ascendance franque, les deux plus fameux étant Mérobaude qui accède au
consulat en 377 et Bauto dont l'influente position lui permet de peser sur la désignation
de l'Empereur en 392. Par ailleurs, des prisonniers francs sont embauchés par
l'administration romaine pour aider au repeuplement des campagnes et assurer ainsi un
rôle notable. L'infiltration franque est ainsi réelle à tous les niveaux de la
hiérarchie sociale gallo-romaine.
En outre, les Francs, et plus particulièrement, les Saliens, profitent des carences de
l'armée d'occupation romaine pour pénétrer en Gaule Belgique. Bénéficiant du
démantèlement des défenses romaines, ils occupent la plaine de Flandre au mépris de la
souveraineté de l'Empire. Plus à l'est, ils s'installent à Mayence, Metz, Trèves ou
Toul.
A partir de 450, les Francs
s'intéressent au Nord de la France. C'est au cours de ces migrations que se dégage
progressivement la suprématie politique des Mérovingiens, jusqu'alors confondus avec les
autres royautés tribales franques. Dès lors, s'engage un processus d'autonomie par
rapport à l'Empire Romain en pleine déliquescence et aboutit, en 486, au coup d'Etat de
Clovis expulsant Sygarius, le chef de l'armée des Gaules, de sa résidence de Soissons.
Païens, ayant intégré de longue date les valeurs et l'organisation administrative
romaines, les Francs peuvent, après trois siècles d'une pénétration lente et
relativement pacifique, s'affirmer comme les successeurs de l'occupant romain en déroute.
En adoptant personnellement la religion catholique, religion officielle de l'Empire depuis
Théodose, Clovis, leur roi, manifeste certes l'autonomie franque mais s'inscrit dans la
ligne directrice tracée par Rome. Son baptême, en 496, est l'aboutissement de son
intégration dans le monde gallo-romain.
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