LOUIS XI, CHEF D'ETAT
	
La marche vers le trône
        
    
    

        
 
            
DEUXIEME ETAPE
Le désaccord entre Charles VII et le
dauphin est arrivé à son paroxysme en ce mois d'août 1456. Le roi, furieux du mariage
de son fils avec Charlotte de Savoie et de son refus à se soumettre à son autorité,
fait marcher son armée sur le Dauphiné. Le futur Louis XI n'a plus le choix. Pour ne pas
être pris comme un malfaiteur, il doit fuir.

Le prince Louis prend rapidement ses
dispositions, laissant le gouvernement du Dauphiné à son ami Louis de Laval. Au matin du
30 août, l'héritier au trône de France se hâte vers le Nord, escorté d'une
cinquantaine de cavaliers, et ne s'arrête qu'après avoir atteint la Franche Comté. A
présent, sur les terres de Philippe le Bon, il est en sécurité. Si le duc de Bourgogne
est, à soixante ans, le maître d'un véritable empire, le futur Louis XI, à trente 
trois ans, possède
déjà une maîtrise consommée de la politique et de la diplomatie. Il a bien organisé
sa retraite. A l'abri de l'abbaye de Saint Claude, où il se repose quelques jours, il
informe Charles VII, son "très redouté seigneur", de ses intentions.

Officiellement, le dauphin demande l'hospitalité du rival de son père sous le prétexte
de préparer conjointement une croisade. Ainsi, il n'offense pas Charles VII, puisque la
cause est religieuse. Son propre honneur, en outre, est sauf. Il n'est pas un vulgaire
fuyard sans le sou (le roi lui a supprimé toute pension), mais un noble défenseur de la
Chrétienté. A Louvain, Louis attend des nouvelles de son hôte, Philippe le Bon, qu'il
appelle familièrement son oncle, en vertu de leurs liens par alliance. Car sa tante,
Michelle de France, le soeur de Charles VII, a été la première épouse du duc de
Bourgogne.

En l'absence de son prince, en campagne
en Hollande, la noblesse bourguignonne fait bon accueil à ce dauphin errant. Louis fait
ensuite étape à Bruxelles, siège de la Maison de Bourgogne. Il y est reçu par la
duchesse Isabelle, avec les honneurs dus à l'héritier du trône de France. On va
jusqu'à lui proposer d'occuper les appartements de son oncle, ce qu'il se garde bien
d'accepter.

Philippe de Bourgogne arrive à Bruxelles le 15 octobre. Il met genou à terre devant le
futur Louis XI, qui le relève et l'embrasse. Puis les deux hommes s'entretiennent en
privé. Le dauphin, qui connaît la puissance du Bourguignon, lui demande de le
réconcilier avec son père. Car si Philippe le Bon est l'adversaire de Charles VII, il
est également son vassal, en tant que comte d'Artois et de Flandre, et pair de France, en
tant que duc de Bourgogne. Mais il est aussi le seul maître de la Franche Comté, du
Luxembourg et des Pays Bas. Une position de puissance, tant politique qu'économique, qui
en fait un allié de poids pour le dauphin.

Tout en assurant Louis de sa protection,
le duc de Bourgogne le prévient qu'il ne le soutiendra pas contre son père. Une attitude
quelque peu ambigüe, qu'il compense en octroyant généreusement à son neveu une pension
annuelle de 36 000 livres et un asile doré, le château de Genappe, au sud de Bruxelles.
C'est là que le dauphin apprend que Charles VII s'est rendu maître du Dauphiné, en
arraisonnant ses officiers. Pour consoler Louis, Philippe le Bon décide de l'emmener
visiter ses territoires, prospères et florissants. Il fait venir, à ses frais, la jeune
dauphine, Charlotte de Savoie. Celle-ci n'avait que douze ans le jour de ses noces.
Aujourd'hui, elle en a dix huit Aussi le couple peut-il enfin, en juillet 1457, consommer le
mariage...

A Genappe, le futur Louis XI respecte scrupuleusement ses devoirs religieux et passe
beaucoup de temps à la chasse. Cela ne l'empêche pas de se tenir au courant des
événements politiques, ceux de la Cour de Bourgogne comme ceux de la Cour du roi son
père, où il a ses informateurs. Charles VII, à mesure que se prolonge le séjour (qui
va durer cinq ans) de son fils chez Philippe le Bon manifeste quelque impatience belliqueuse.
Les escarmouches aux frontières du duché de Bourgogne et du royaume de France se
multiplient. Les ambassadeurs de Charles VII laissent planer la menace, accusant Philippe
le Bon d'utiliser le dauphin à des fins hégémoniques. Bien que le duc de Bourgogne et
le prince Louis clament leur bonne foi, la situation semble tout près de s'envenimer.

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