LES CAPETIENS
PHILIPPE AUGUSTE, CHEF DE GUERRE

 

LA VICTOIRE DE LA ROCHE AUX MOINES
(2 JUILLET 1214)

En 1213, une vaste coalition orchestrée par l'empereur germanique Othon de Brunswick et le roi d'Angleterre Jean Sans Terre se joue contre Philippe Auguste. Pris entre deux fronts, le roi de France laisse au dauphin Louis le soin d'arrêter l'offensive à l'ouest du royaume. Au début de l'été 1214, le futur Louis VIII est vainqueur à la Roche aux Moines sur une armée trois fois plus importante que la sienne.

Son pouvoir chancelant en Angleterre, Jean Sans Terre espère redorer son blason en reconquérant ses fiefs de l'ouest de la France. De son côté, l'empereur germanique Othon décide de prendre le contrôle de la Flandre. Une double menace pour Philippe Auguste qui va être simultanément attaqué sur deux fronts, à l'ouest et au nord-est.

Pour Jean Sans Terre, qui ne possède même pas une armée digne de ce nom, le pari est risqué, même s'il bénéficie de l'appui des ports de Bordeaux et la Rochelle, grâce aux relations commerciales que les marchands entretiennent avec l'Angleterre. Pour obtenir le soutien de ses anciens vassaux, Jean Sans Terre comble la noblesse d'Aquitaine de cadeaux. En 1214, il débarque à La Rochelle et recueille la soumission des seigneurs de Poitou, d'Angoulême, du Limousin et de Nevers. Pendant ce temps, Philippe Auguste contrôle la vallée moyenne de la Loire, la Touraine, le Maine et l'Anjou. Mais le roi de France doit réprimer les trahisons de la noblesse et ralentir l'avance de l'ennemi. Aussi il lance ses troupes vers le sud, progressant jusqu'à Châteauroux et, dans un mouvement tournant, se dirigeant vers La Rochelle afin de couper la retraite à Jean Sans Terre. Prudent, l'Anglais esquive le combat et se réfugie à Bordeaux.
En mai, Philippe Auguste part faire brèche à l'avancée d'Othon sur le front nord. Il confie à son fils Louis une grande partie de sa cavalerie et la mission de contenir l'ennemi. Le dauphin rend grâce à Dieu et remercie son père "de ce qu'il l'avait chargé de si grande affaire du règne et qu'il lui donna l'occasion d'exploits dont il pouvait acquérir louanges et renommée". Sitôt Philippe Auguste parti, Jean Sans Terre reprend l'offensive. Il soumet les puissants seigneurs de Lusignan et contrôle désormais le Poitou et l'Aquitaine. Mais il se heurte à une ligne de front qui s'étend de Nantes tenue par Robert de Dreux, à Chinon, occupée par Louis, et à l'Anjou, où l'attendent Guillaume des Roches et Arnaury de Craon, restés fidèles au roi de France.

Craignant de voir couper sa retraite vers la mer, l'Anglais choisit d'attaquer Nantes. Malgré la capture de Robert de Dreux, la cité résiste à l'assaut. Cette résistance impose à l'Anglais de remonter la Loire. Il occupe Ancenis, puis Angers, en juin 1214. A quelques kilomètres de là, s'élève la forteresse de La Roche aux Moines. Sa situation, au carrefour des routes de Nantes, du Poitou et du Mans, est d'un indéniable intérêt stratégique. Jean Sans Terre décide de s'en emparer puis de poursuivre sa progression sur Paris. Le 19 juin 1214, il met le siège sous les hautes murailles. Sous le nombre, les assiégés résistent vaillamment mais ne peuvent tenir longtemps. Louis sait l'enjeu d'importance. Pourtant, il hésite à se porter au secours de la cité. Son armée ne compte que 10 000 sergents à pied et 300 chevaliers et devra affronter un adversaire trois fois supérieur en nombre. Le prince demande conseil à son père. Sans hésitation, Philippe Auguste l'engage à marcher sur l'ennemi. Selon l'usage, Louis lance son défi au roi d'Angleterre Celui-ci aurait répondu : "qu'il était prêt à combattre et que plus tôt il viendrait, plus tôt il regretterait d'être venu". Mais Jean Sans Terre se montre bien trop optimiste. A peine Louis et sa troupe, commandée par le maréchal Henri Clément, arrivent à La Roche aux Moines que l'ennemi lève le siège et quitte la place, avec armes et bagages, dans un indescriptible désordre. Au moment fatidique, les seigneurs poitevins refusent le combat et retraversent la Loire. Pendant que Jean Sans Terre est abandonné par ses vassaux, la majeure partie de ses troupes se noie dans le fleuve. Humilié, le roi d'Angleterre se réfugie à La Rochelle, sans même tenter de rejoindre ses alliés dans le nord.
Philippe Auguste ne se bat plus que sur un seul front. Bientôt va sonner l'heure de Bouvines. Quant au prince Louis, il est entré dans la légende. Sans même avoir donné un coup d'épée, il est désormais le "Lion". La légende voudrait qu'il ait engagé la bataille le même jour que son père à Bouvines. Leurs messagers se seraient rencontrés à mi-chemin et auraient levé "les mains, au ciel, bénissant le Seigneur qui, par une coïncidence merveilleuse, avait permis au père et au fils de triompher de leurs ennemis au même moment".

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