LE DESASTRE NAVAL DE L'ECLUSE (24 juin 1340)
Le 24 juin 1340, Français et Anglais
livrent à l'Ecluse, en aval du port de Bruges, l'une des plus grandes batailles navales
de l'Histoire. Quarante mille hommes et quatre cent cinquante navires s'affrontent dans une effroyable mêlée qui
se termine par un corps à corps meurtrier. Côté français, le premier combat naval de
la Guerre de Cent Ans, commencée quelques mois plus tôt, se solde par un désastre.
En décembre 1399, les Flamands, conduits
par le marchand drapier Jacques Van Artevelde, reconnaissent l'Anglais Edouard III comme
roi de France et lui promettent une aide militaire. Philippe VI décide alors de couper
court à cette entente et d'empêcher Edouard III et son armée de rallier la Flandre.
Pour cela, il lui faut détruire la marine anglaise. En 1340, la flotte de Philippe VI est
tout, sauf une flottille de caboteurs. Depuis le début du siècle, le Clos des Galées,
l'arsenal installé sur la Seine près de Rouen, a construit une véritable marine de
guerre. Il y a là de petites nefs, maniables et rapides, où soixante hommes équipés
d'arbalètes forment une avant-garde redoutable. Puis de grands vaisseaux, tel le Saint
Georges, navire amiral du roi, pouvant embarquer jusqu'à 200 hommes et des pots à feu
projetant des garrots, flèches à empennage de métal. Certains vaisseaux sont armé de
lourdes arbalètes à tour que l'on bande au moulinet. A cette escadre, il faut ajouter la
quarantaine de galées italiennes, souvent génoises, pilotées par de véritables
professionnels de la course en mer.
Mais cette impressionnante force de frappe a son talon d'Achille : son commandement.
Philippe VI l'a confié à Hue Quiéret et Nicolas Béhuchet. Le premier, nommé amiral en
1336, a fait ses armes dans la chevalerie et n'a aucune expérience de la mer. Le second,
général de l'armée de mer, est un spécialiste des Finances sans aucune compétence en
matière de stratégie navale. Si son tableau de chasse compte, depuis 1338, quelques
navires anglais, il le doit à la fortune d'un combat bien peu équitable à dix contre
un! Ainsi, malgré les conseils avisés des Génois, la tactique mise en place pour
arrêter l'escadre anglaise va s'avérer d'une incroyable maladresse.
Fin mai 1340, la flotte française
appareille de Harfleur et du Crotoy et cingle vers Bruges. Deus cents navires et vingt
mille
hommes d'équipage sont bientôt postés devant l'Ecluse, l'avant-port de la cité
flamande. Béhuchet décide alors d'organiser le blocus du port. Il place ses navires à
bord sur trois rangs, voiles abattues, et renforce cette muraille flottante par une chaîne
fixée à chacune des deux rives. Et attend les Anglais...
Au matin du 24 juin, apparaît à l'horizon l'armada (deux cent cinquante navires et vingt
mille hommes)
commandées par Edouard III en personne. Elle semble immobile à quelques encablures de
l'Ecluse. Et de fait, les Anglais attendent eux aussi... Que le vent, le soleil et la
marée leur soient propices. Quelques heures plus tard, quatre grosses nefs anglaises passent
soudain à l'attaque. Elles se dirigent vers les quatre navires français qui, à l'avant de la
barricade, sont les seuls à ne pas être enchaînés. Le choc est rude mais semble
tourner à l'avantage des arbalétriers français. C'est alors que la flotte anglaise,
restée au large, s'ébranle. A 200 mètres de l'ennemi, les archers anglais décochent
une pluie de flèches meurtrières. Ainsi protégés, les navires d'Edouard III
parviennent sans grand dommage à portée d'abordage des Français. Les unes après les
autres, les nefs de Philippe VI, incapables de naviguer, sont investies.
Au même moment, depuis le rivage, Les Flamands entrent dans la mêlée. A bout portant,
l'artillerie est impuissante. C'est donc au couteau et à la hache d'abordage que la
bataille s'engage. Dans la confusion générale, Béhuchet et Quiéret parviennent malgré
tout à grimper avec un petit détachement sur le Thomas, navire amiral anglais. Edouard
III, qui défend son château arrière, est sévèrement blessé. Bientôt submergés, les
Français doivent se rendre. Béhuchet est pendu sur-le-champ alors que Quériet, mourant,
est décapité sur le bastingage. Les rescapés se noient ou sont tués par les Flamands
qui les attendent sur la berge. Seule une trentaine de navires parvient à gagner le large
laissant dans les eaux maudites du Zwyn plus de 15 000 victimes.
Le rêve d'invasion de l'Angleterre sombre à l'Ecluse en même temps que la flotte de
Philippe VI. La marine française n'existe plus. Il ne reste plus désormais que la
chevalerie. Six ans plus tard, elle sera décimée à Crécy. La Guerre de Cent Ans
commence mal!!!
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