LES CAPETIENS
PHILIPPE 1ER, CHEF DE GUERRE

 

LA DEROUTE DE PHILIPPE 1ER DEVANT HUGUES DU PUISET
(PRINTEMPS 1079)

"Quand l'honneur l'appelait au combat / L'amour le retenait dans ses Etats". C'est ainsi que, en 1654, dans son Histoire de France, l'abbé Le Rageais portraiture Philippe 1er. Mais le Capétien n'entend pas pour autant laisser ses vassaux battre son autorité en brèche. Mais, au printemps 1079, impuissant à faire rendre raison à l'un des plus frondeurs d'entre eux, le seigneur Hugues du Puiset, il essuiera une cuisante et humiliante défaite.

Dans quelle faiblesse se trouve la monarchie capétienne au XIème siècle! Maints grands féodaux sont aussi puissants que le roi, et jusque dans son propre domaine, nombre d'entre eux échappent à son autorité. Au point que Philippe 1er ne peut se rendre de Paris à Orléans sans subir les attaques du seigneur Hugues du Puiset, qui, faisant fi des gens d'armes de l'escorte royale, tente de s'emparer des archives, de l'argent et des objets de valeur qui suivent le roi dans chacun de ses déplacements.
Contre ses vassaux rebelles, tels Hugues de Dammartin et Simon de Valois, le Capétien a conduit plusieurs campagnes militaires, mais sans parvenir à des résultats décisifs. Peu avant sa mort, en juillet 1108, il parviendra néanmoins à s'emparer de la tour de Monthléry, devenue un repaire de pillards, et confiera à son fils Louis VI : "Va, Louis, mon fils, veille avec grand soin à la conservation de cette tour. Voici que les tracas qu'elle m'a causés ont fait de moi presque un vieillard, la ruse et la déloyale méchanceté ne m'ont jamais permis de connaître ni bonne paix, ni repos".

Parmi ces châtelains frondeurs, Hugues du Puiset est l'un de ceux qui causent le plus de souci à Philippe 1er. Depuis qu'il est le maître de la forteresse du Puiset, il s'en prend sans vergogne tant au voyageur (serait-il le roi en personne) qu'à ses voisins et aux biens de l'Eglise.
Le fait est d'autant plus grave que son repaire, construit vers 1030 et ayant appartenu au roi de France avant de passer à sa famille, issue de la branche des vicomtes de Chartres, est planté en Beauce comme une dangereuse épine au coeur du domaine royal, sur la route de Paris à Orléans. Sans compter que le sire du Puiset, guidé par son seul profit, fait fi de l'autorité du Capétien tout en tentant de l'affaiblir en se liant avec des barons aux ambitions aussi peu loyales que les siennes.
C'est ainsi que Guillaume le Conquérant, roi d'Angleterre et vassal du roi de France en tant que duc de Normandie, voit d'un très mauvais oeil Philippe 1er se mêler de ses affaires en soutenant Robert Courteheuse, son fils rebelle. Pour rendre au Capétien la monnaie de sa pièce, il promet des secours en argent et en hommes à certains des seigneurs en révolte. Plusieurs d'entre eux, dont Hugues du Puiset, le plus belliqueux, prennent alors les armes; si bien que Philippe 1er, inquiet, juge plus prudent de signer la paix avec le Conquérant en janvier 1079.
Au printemps suivant, le roi décide d'en finir avec Hugues du Puiset et met le siège devant le château de Yèvre le Châtel, près de Pithiviers, où le seigneur rebelle et ses hommes se sont retranchés.

Philippe 1er est si peu sûr d'avoir le dessus que non seulement il convoque l'ost royal, mais fait également appel à son cousin Eudes de Bourgogne, qui le rejoint avec ses troupes et le renfort du comte Guillaume de Nevers et de l'évêque Geoffroi d'Auxerre. Hugues du Puiset, assiégé par un adversaire bien supérieur en nombre, laisse plusieurs jours s'écouler, au cours desquels rien ne se passe. Puis, brusquement, il tente une sortie, lance ses hommes à l'improviste sur les assiégeants. L'attaque, audacieuse, sème la panique parmi les troupes de Philippe 1er et de ses alliés, qui prennent la fuite précipitamment en abandonnant une partie de leur équipement. Le sire du Puiset est tout aussi surpris des conséquences, heureuses et inattendues, de sa témérité : avec une poignée d'hommes, il a mis en déroute une armée nombreuse. Poussant son avantage, il se lance à la poursuite de l'adversaire qui fait retraite et capture plusieurs capitaines du roi. L'évêque d'Auxerre et le comte de Nevers sont de ceux là, qui devront racheter leur liberté par une forte somme d'argent et ne seront relâchés que l'année suivante, en 1080.
Cett humiliante défaite de Philippe 1er montre combien il est difficile à la monarchie capétienne d'imposer son autorité aux grands féodaux. Et il faudra encore une vingtaine d'années et maintes expéditions punitives pour que son successeur, Louis VI, vienne définitivement à bout d'Hugues du Puiset.

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