LES CAPETIENS
PHILIPPE AUGUSTE ET LES PERSONNALITES
LA MORT DE RICHARD COEUR DE LION
Au printemps 1199, Richard Coeur de Lion vient d'obtenir une paix durement gagnée avec Philippe Auguste, son ancien ennemi avec lequel il était en guerre depuis cinq ans. Mais c'est loin du champ de bataille que le roi d'Angleterre va être mortellement blessé. Courageux jusqu'à la témérité, généreux et loyal au combat, celui que le chroniqueur Gervais de Tilbury nomme "le roi des rois" s'éteint à quarante et un ans, en pleine force de l'âge. Avec la mort de l'ardent Plantagenêt, c'en est désormais fini du grand royaume d'Angleterre s'étendant de l'Ecosse aux Pyrénées.
Si Richard Coeur de Lion n'y avait laissé la vie, l'histoire aurait sans doute à peine retenu les faits survenus au cours du siège du château de Châlus tant l'enjeu semble ridicule en regard des épreuves traversées par le roi d'Angleterre. En 1119, Richard vient de mettre un terme, en vainqueur, aux cinq années de combats qui l'ont opposé à Philippe Auguste. Cette trêve lui donne l'occasion de remettre un peu d'ordre dans ses fiefs d'Aquitaine, hérités de sa mère Aliénor. Rien ne laisse prévoir que ces affaires pour le moins ordinaires auront une issue fatale.
Afin de rentrer dans les bonnes grâces
de son suzerain, le vicomte de Limoges, qui, un temps, est passé dans le camp français,
se fait un "devoir" d'informer Richard qu'Achard, comte de Châlus, a
découvert un trésor. La coutume française veut qu'en tel cas une part revienne au roi.
Mais, si on se réfère à la coutume normande, le souverain peut en recouvrir la
totalité. Or, Richard aime les beaux objets, tant pour leur intérêt artistique
qu'archéologique.
N'a-t-il pas offert l'épée d'Excalibur à Tancrède ? Aussi décide-t-il d'aller
examiner ce trésor de près et part pour le Limousin, accompagné de Jean Mercadier, son
plus fidèle mercenaire, et de quelques routiers. Le 25 mars 1199, Richard et sa petite
troupe sont en vue du château de Châlus qui domine la haute vallée de la Tradoire.
Richard est à peine arrivé que les occupants de Châlus proposent de se livrer si le roi
d'Angleterre leur laisse la vie sauve et leurs armes. Mais le souverain refuse et met, le
jour même, le siège devant Châlus. Le lendemain, 26 mars, il fait le tour des
murailles, pour une reconnaissance apparemment sans danger. C'est alors qu'un trait
d'arbalète, décoché du haut de la Tour Ronde, l'atteint à l'épaule. Le tireur est un
certain Bertrand de Gourdon. Le roi lui crie son compliment et regagne sa tente sans
s'inquiéter plus avant. Négligeant sa blessure, il ordonne à Mercadier de donner
l'assaut. Châlus tombe rapidement aux mains de ses assaillants. Tous les assiégés sont
pendus, à l'exception de l'arbalétrier Gourdon.
Mais Richard ne portait pas d'armure et la blessure n'est bénigne qu'en apparence.
Maladroit, le médecin envoyé par Mercadier casse le bois de la flèche et laisse le fer
dans la chair. Il ne parvient à l'extraire qu'en pratiquant une profonde incision et en
causant des dommages irréparables. On lave la blessure avec du vin et on la couvre de
lard, censé favoriser la cicatrisation. Mais, en quelques jours, l'infection gagne la
plaie, avant de se généraliser. Richard sait désormais que la blessure est mortelle,
que ses jours sont comptés. Il envoie quérir sa mère, Aliénor d'Aquitaine, à
Fontevrault, et prend ses dernières dispositions. Il confie son royaume à son frère,
Jean sans Terre. Il partage aussi son trésor, dont il attribue la plus grosse part à son
neveu, Otton de Brunswick, et réserve le quart aux pauvres et à ses serviteurs ; il fait
ensuite venir Gordon à son chevet. Il lui accorde son pardon (pour preuve, il lui remet
cent sous d'esterlin) et ordonne qu'on lui laisse la vie sauve. Enfin, son chapelain,
Pierre Milon, abbé du Pin, reçoit sa confession ; Richard n 'a pas osé se confesser
depuis son retour de Terre Sainte tant sa rancoeur à l'encontre de Philippe Auguste
est grande !
Au soir du 6 avril, Aliénor d'Aquitaine, qui a presque quatre vingt ans, recueille le dernier
soupir de son fils. Le corps est transporté à l'abbaye de Fontevrault où ont lieu les
funérailles solennelles.
Le dimanche des Rameaux, Richard est enterré auprès de son père, Henry II Plantagenêt,
et, selon son voeu, son coeur est déposé à la cathédrale de Rouen.
La mort de Ricard Coeur de Lion laisse le royaume d'Angleterre orphelin. Le pays tout
entier pleure le plus aimé de ses rois, un souverain aussi brave que généreux.
Mercadier, lui, n'a cure du royal pardon et ordonne l'arrestation de l'arbalétrier qu'il
fait écorcher et pendre. "En causant ce trépas, Fourmi terrassa Lion ! Immense est
la douleur et dans un si grand deuil, c'est l'univers entier qui gît dans un
cercueil..."
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