LES CAPETIENS
PHILIPPE IV LE BEL ET LES PERSONNALITES
Guillaume de Nogaret

 

GUILLAUME DE NOGARET, GARDE DU SCEAU DE PHILIPPE LE BEL

Brillant professeur de droit, Guillaume de Nogaret obtient en 1307 la garde du sceau de Philippe le Bel. Ce petit-fils de cathare, excommunié par le pape Boniface VIII qu'il poursuit de sa haine au-delà de la mort, est sans doute le premier homme d'Etat à utiliser l'opinion publique pour parvenir à ses fins.

Le 22 septembre 1307, le Conseil du roi décide dans le plus grand secret l'arrestation des Templiers. Le même jour, la nomination de Guillaume de Nogaret au poste de garde du Sceau passe presque inaperçue. Le nouveau promu exerce déjà une influence majeure au sein du Conseil et cette nomination vient couronner quinze années de fidèles et loyaux services.

Originaire de la région de Toulouse (son grand-père a été brûlé comme cathare) Guillaume de Nogaret s'engage très tôt dans l'étude des lois et enseigne le droit romain à l'université de Montpellier. Ce juriste réputé est consulté par les seigneurs, les officiers royaux et même par le roi de Majorque. Sa notoriété parvient jusqu'à Philippe le Bel qui lui confie quelques dossiers heureusement conclus. L'ambition gagne alors ce légiste qui décide de quitter l'horizon trop étroit du Languedoc pour Paris. En 1294, Nogaret siège au Parlement où se jugent les grandes affaires d'Etat. Sa grande compétence lui octroie la noblesse, en 1299. Sa carrière est définitivement lancée au point qu'à la mort du chancelier Pierre Flote, en 1302, Nogaret devient le premier des légistes du Conseil. Mais il ne conseille déjà plus, il gouverne. Sa désignation au poste du Garde du Sceau (titre qu'il gardera jusqu'à sa mort, en avril 1313) n'est rien d'autre que la reconnaissance de son pouvoir de fait et, surtout, de l'adhésion du roi à sa politique. Car Nogaret milite pour l'extension des droits du souverain dans son royaume et aiguille la royauté capétienne vers l'absolutisme.
Lorsque Nogaret prend en charge le Sceau, deux grandes affaires occupent le royaume : celle du procès contre la mémoire de Boniface VIII, et celle des Templiers. L'insatiable ambition, alliée à la démesure du verbe et du geste, va entraîner le garde du Sceau à user de procédés, pour le moins outranciers et, finalement, à régler des comptes personnels.

Ainsi, le procès contre la mémoire du pape Boniface VIII tient davantage de la rancune personnelle que de la grande politique. En 1296, lorsque Philippe le Bel et le souverain pontife entrent violemment en conflit, Nogaret prend le dossier en main.
Sa stratégie est simple : discréditer le pape plutôt qu'engager une joute sur le terrain du droit. Le pape est accusé d'hérésie, de népotisme et finalement de meurtre sur la personne de son prédécesseur. L'estocade est donnée par Nogaret qui vient annoncer lui-même à Boniface VIII qu'il sera prochainement jugé. Le pape ne survit pas à l'humiliation et meurt, en octobre 1303, après avoir excommunié l'impétueux Nogaret. Quatre ans plus tard, le garde du Sceau poursuit toujours le défunt pontife de sa hargne vengeresse. Car condamner sa mémoire, c'est aussi donner raison à ses adversaires. Et donc lever la sentence d'excommunication ! Tout est bon pour le chancelier qui n'hésite pas à exiger, mais en vain, l'exhumation du corps de son ennemi et la destruction de ses ossements. De guerre lasse, et englué dans l'épineuse question des Templiers, le successeur de Boniface, le pape Clément V, lève l'excommunication du chancelier en 1311. Il pose pour seule condition que Nogaret effectue un pèlerinage en Terre Sainte, qui ne se fera jamais.

La seconde grande affaire est celle des Templiers. Nogaret ordonne leur arrestation. Il joue à merveille de ce que l'on peut déjà nommer "l'opinion publique", qui se repaît des pamphlets accusateurs et injurieux diffusés par les services du chancelier. Ainsi les Français, mais aussi le pape, apprennent-ils ébahis que les hommes du Temple sont hérétiques, idolâtres, renégats et même sodomites. En 1312, l'ordre est dissous et de nombreux Templiers suppliciés. La personnalité et les méthodes de Guillaume de Nogaret sont pour le moins controversées. Certains, comme Renan, lui trouvent l'étoffe d'un grand homme d'Etat. D'autres, au contraire, le considèrent comme un exalté dont la passion sans scrupule domine tous les principes moraux. Mais en ces temps où la fin justifie les moyens, Nogaret est l'âme de la politique anticléricale de Philippe le Bel, un docile et intransigeant héraut de la toute puissance capétienne.

Le plus de la fiche

Page MAJ ou créée le

© cliannaz@free.fr