LES MEROVINGIENS

DESCENDANTS DE CLOTAIRE 1ER : SIGEBERT ET CHILPERIC

 

VENANCE FORTUNAT, UN POETE CHRETIEN

Lettré italien, Venance Honorius Clementianus Fortunatus fascine la Cour mérovingienne, où l'on encourage son talent. Mais son destin le porte au-devant d'une des femmes les plus brillantes de son temps : la reine Radegonde. Il sera le chapelain, le protégé et l'ami de cette princesse thuringienne que le roi Clotaire 1er a épousée contre son gré et qui s'est réfugiée dans le silence de Dieu au monastère Sainte Croix, qu'elle a fondé à Poitiers.

Venance Honorius Clementianus Fortunatus est né vers 530-540 à Duplavilis, près de Trévise, en Vénétie. Ses parents, qui ont un autre fils et une fille, sont très probablement fortunés et liés à l'aristocratie, comme semblent l'indiquer les trois prénoms de Fortunat, pratique traditionnelle dans l'élité romaine. A Ravenne, l'ancienne capitale impériale, le jeune Venance reçoit une éducation qui aurait pu sans difficulté le conduire aux plus hautes charges de l'Etat ou de l'Eglise. Rhétorique, littérature classique, administration sont son lot pendant plusieurs années d'étude.

C'est vers 565 que Venance Fortunat quitte sa Vénétie natale pour se rendre à Metz, capitale du royaume d'Austrasie de Sigebert 1er. On a pu croire que Fortunat a dû fuir l'Italie à cause d'opinions religieuses schismatiques, mais il est plus probable qu'il a été envoyé en Gaule du Nord comme agent impérial. Alors que la deuxième vague de barbares déferle sur l'Europe, Constantinople souhaite rappeler aux Germains établis sur les anciens territoires de l'Empire d'Occident  le lien qui les unit à la culture romaine. Le jeune et brillant poète italien est parfaitement à même de remplir cette délicate entreprise de séduction.
L'arivée de Fortunat est attendue avec impatience à la Cour d'Austrasie. On dépêche à sa rencontre le futur comte Sigoald, chargé par Sigebert 1er de rendre son voyage le plus agréable possible. Le lettré italien et son escorte franque franchissent le Rhin à Mayence et arivent à Metz à point nommé pour le mariage de Sigebert avec la belle Brunehaut. Là, Fortunat rédige une élégie devenue célèbre à la gloire des souverains, qu'il accompagne ensuite dans leurs pérégrinations nuptiales de Verdun à Reims, puis de Cologne à Trêves.
Peut-être désireux d'aller se recueillir sur le tombeau de Saint Martin de Tours, cherchant sans doute aussi à rejoindre Martin de Braga, évêque de Dumium au Portugal, Fortunat poursuit sa route vers le sud. Avant de gagner Poitiers, il est accueilli à Paris par le roi Charibert et la reine mère Iltrogothe.

Séduit par l'intelligence et la culture de Radegonde, l'ancienne épouse de Clotaire 1er devenue nonne, autant que par son influence sur la dynastie mérovingienne, Fortunat se lie d'amitié avec la fondatrice du monastère Sainte Croix de Poitiers, dont il devient le chapelain, le protégé et l'ami. Il remplit d'abord la fonction de chargé d'affaires de la communauté, avant d'être élevé à la prêtrise, en 574 ou 576. Cependant, lors de son séjour dans le Poitou, Fortunat souffre de l'animosité affichée de Marovée, l'évêque de Poitiers, jaloux de la renommée du monastère royal et de ses hôtes. Cette hostilité n'empêche pas l'Italien de se lier d'amitié avec de nombreux autres prélats de la région : Eufrone de Tours, Félix de Nantes, Léonce de Bordeaux et Bertrand, son successeur.
C'est dans cette atmosphère chaleureuse que Fortunat rédige, entre 568 et 576, ses principales oeuvres. Il s'agit de biographies pieuses, comme les récits tirés de l'histoire de Radegonde ou un long poème relatant la vie de Saint Martin; d'hymnes, comme celu qu'il écrit à la demande de Radegonde à l'occasion de la réception au monastère des reliques de la Vraie Croix; d'une triste élégie contant le tragique destin de Galswinthe, la soeur de Brunehaut, assassinée par Chilpéric 1er, roi de Neustrie; de poèmes réunis dans le recueil des Carmina.
Le bel élan créateur de Fortunat est cependant brisé par la mainmise de Chilpéric 1er sur Poitiers, événement qui sonne le glas de paisibles années et donne libre cours aux tracasseries de Marovée. Mais le sort est de nouveau favorable à Fortunat à partir de 584, avec la mort du tyrannique roi de Neustrie. Malheureusement, Radegonde disparaît à son tour en 587, drame intime pour le poète qui abandonne provisoirement Poitiers, hanté par trop de souvenirs, pour accompagner son ami Grégoire de Tours dans une ambassade à Metz auprès de Gontran, roi de Burgondie.
Revenu à Poitiers, Fortunat met un terme à la rébellion des religieuses fomentée par la princesse Chrodielde, la fille de Charibert. Vers 590, il rédige une dédicace déstinée à l'inauguration de la nouvelle cathédrale de Tours. Devenu évêque en 597, il meurt vers 600.

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