LES CAPETIENS
PHILIPPE AUGUSTE, CHEF D'ETAT

 

PHILIPPE AUGUSTE CHERCHE DE L'ARGENT
(1188)

A peine élu, le pape Innocent III intervient dans les affaires de la France et d'Angleterre. Rome étant devenue le centre de la vie politique européenne, le nouveau pontife, dès le mois d'août 1188, ordonne au roi de France, Philippe Auguste et au roi d'Angleterre, Richard Coeur de Lion de faire la paix pour aller délivrer le tombeau du Christ : qu'ils se battent certes, mais ensemble et contre les Infidèles. Le roi de France l'écoute d'autant plus facilement que son armée est exsangue. Mais comment trouver l'argent nécessaire?

Philippe Auguste est jeune, il a vingt cinq ans, et est encore bel homme. De sa mère Adèle il tient une intelligence ouverte liée à l'amour du pouvoir. S'il est toujours nerveux, émotif, ce n'est plus le garçon mal peigné qui fut lancé, adolescent, dans une carrière pleine de pièges. Ni les rois ni les papes ne briseront son énergie et sa capacité d'improviser en fonction de buts longtemps médités.
Puisque l'infidèle Saladin, sultan du Caire, vient de reprendre Jérusalem, Philippe Auguste crée une dîme chargée de drainer l'argent pour la Croisade, baptisée "dîme saladine". Elle est très mal reçue parce qu'elle ne concerne pas que les pauvres cette fois, mais également les clercs, les nobles et les bourgeois. Le clergé proteste : "On dépouille l'Eglise alors qu'on doit l'enrichir du butin de la victoire. Le roi ne peut exiger de nous que des prières". Néanmoins, Philippe pour une fois d'accord avec son rival Richard, s'emploie à faire rentrer l'argent : le dixième des biens meubles et revenu de l'année. La lourde taxe est perçue dans chaque diocèse par un Templier et un Hospitalier. Seuls payent ceux qui ne partent pas en croisade. L'argent est censé entretenir ceux qui luttent contre Saladin.

Mais les abus sont nombreux. L'Occident s'emplit de plaintes et non de prières ferventes. L'évêque Arnoul de Guines dépense l'argent saint en joyeuses bombances tandis que son collègue de Durham s'offre de la vaisselle précieuse. Au milieu de l'année 1190 les barons associés aux prélats exigent que cette "énormité" ne se reproduise plus. Philippe, la mort dans l'âme, doit supprimer la dîme "qui offense Dieu plutôt qu'elle ne l'apaise". Riches prélats et puissants barons volent chrétiennement au secours des veuves et des pauvres. Richard Coeur de Lion n'a pas les scrupules de Philippe Auguste. Sa seule violence en impose à ses sujets et il rajoute même un texte sur le charruage qui lui donne une écrasante supériorité financière sur le roi de France. Philippe trouve quand même de quoi armer 650 chevaliers, deux écuyers par chevalier et 4 300 gens de pied.
Réunis à Vézelay, dans l'Yonne, les deux alliés font route commune vers Marseille où ils doivent embarquer. Philippe Auguste et son armée partiront sur cent navires dont les plus ventrus s'appellent "huissiers" parce qu'une grande porte, un huis, s'ouvre à la poupe pour que les chevaux puissent embarquer. Les armateurs génois qui fournissent l'essentiel de la petite armada réclament 30 000 marcs d'argent. Une fois encore Richard écrase son vieux rival de sa supériorité : 156 nefs, 24 busses, navires à contenance double, partent de Londres pour rejoindre l'escorte de 39 galères, armées à Marseille.
Après une longue escale à Messine, en Sicile, Richard ira prendre Chypre aux Byzantins tandis que Philippe cinglera directement vers la cible, le port forteresse de Saint Jean d'Acre, centre oriental stratégique de la Méditerranée. Chypre va devenir la base arrière de toutes les futures croisades dont aucune ne réussira. Mais l'aventure continue.

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