CLOVIS, CHEF D'ETAT
CLOVIS ROI DE TOUS LES FRANCS
En 508, Clovis est à l'apogée de son règne. Afin d'asseoir son pouvoir, le Mérovingien va éliminer les rois des Francs saliens et ripuaires. Au terme de deux années pendant lesquelles il aura, implacablement et sans états d'âme, recours à la violence et à la ruse, il va se retrouver à la tête d'un royaume puissant et des Francs unifiés.
Depuis la victoire de Vouillé sur les Wisigoths en
507, le royaume franc de Clovis forme une entité territoriale cohérente
qui s'étend de la Belgique à l'Aquitaine, de la marche bretonne
à la rive occidentale du Rhin. Depuis qu'il a vaincu Syagrius à
Soissons en 486, et s'est vu, lors de la cérémonie de Tours, conférer
le titre de "consul" par Anastase, l'Empereur d'Orient, Clovis fait
figure d'héritier de l'Empire Romain d'Occident. Seul parmi les rois
barbares à s'être converti à la foi catholique, il apparaît
à la population gallo-romaine comme le meilleur des souverains possibles.
Mais il n'est pas le seul roi parmi les Francs, et sa suprématie n'est
pas encore définitivement assurée. Quelque roitelets ripuaires
ou saliens pourraient bien vouloir en découdre ou, après sa mort,
spolier ses fils de son héritage.
C'est dans ce contexte que Clovis, aussitôt après
avoir fait de Paris sa capitale, décide d'éliminer ses rivaux
potentiels, par des moyens pour le moins expéditifs. Sa première
victime est Sigebert le Boiteux, roi des Francs rhénans de Cologne. Clovis
ne peut s'opposer de front à ce souverain relativement puissant qui a
en outre été son fidèle allié lors de ses précédentes
campagnes militaires. Aussi il s'efforce de convaincre Childéric, le
fils de Sigebert, que le vieux roi n'est plus en mesure de gouverner. Il se
dit tout disposé à reconnaître le jeune prince dès
la mort de son père. L'argument est bien mince, mais il suffit pourtant
à l'influençable Childéric qui fait exécuter Sigebert
aux abords de la forêt de Buchau. Puis, le crédule parricide s'empresse
d'offrir à Clovis une part du trésor paternel qu'il vient de s'approprier.
Mais Clovis n'a jamais eu l'intention de respecter son engagement et ordonne
à ses sbires d'éliminer Childéric. Comme celui-ci s'extasie
devant une malle remplie d'objets précieux, on lui fracasse le crâne
d'un coup de hache. Clovis a alors beau jeu de pénétrer en Rhénanie
pour se faire hisser sur le pavois et revendiquer le titre de roi des Francs
rhénans, dont Childéric, "coupable" d'avoir lâchement
abattu son père, est indigne
La deuxième victime des manigances de Clovis est Chararic,
souverain d'un royaume situé au nord de la Belgique, sans doute celui
de Tongres. Un roi qui a eu le front de lui refuser de l'aider dans sa lutte
contre Syagrius quelques vingt ans plus tôt. Sans difficulté, Clovis
parvient à s'emparer de Chararic et de son fils. Il les fait tonsurer,
leur faisant perdre ainsi leur longue chevelure, symbole chez les Francs de
l'autorité et de la puissance royales. Le père est contraint de
se faire prêtre et le fils, diacre. Mais, comme les deux hommes menacent
de se venger dès que leurs cheveux auront repoussé, ils sont aussitôt
exécutés.
Puis c'est au tour de Ragnacaire, roi ripuaire de Cambrai d'être l'objet
de la vindicte de Clovis. Dans un premier temps, celui-ci entreprend de soudoyer
les leudes du souverain en leur promettant les hautes fonctions civiles ou militaires
qui leur ont jusque là été refusées. Fort de la
complicité de l'aristocratie locale, il livre bataille à Ragnacaire,
qu'il fait prisonnier avec son frère, Ricar. Puis il dénonce le
premier comme indigne de sa fonction, puisqu'il s'est laissé capturer,
et le second comme un couard qui n'a pas su secourir son aîné.
Après avoir ainsi sauvé les apparences, Clovis se saisit de sa
francisque et décapite les deux hommes. Le troisième frère,
Ricomer du Mans, a pu s'enfuir, mais a finalement été capturé
et mis à mort. Quant aux leudes ripuaires, ils sont trop heureux d'avoir
eu la vie sauve et n'osent réclamer les titres qui leur ont été
promis.
Ces crimes atroces, l'historien Grégoire de Tours les met sur le compte
de la nécessaire élimination des "concurrents" du roi
catholique : "Ainsi, Dieu prosternait chaque jour
ses ennemis sous sa main e agrandissait son royaume parce que Clovis marchait
d'un coeur droit devant lui et faisait ce qui plaisait aux yeux de Dieu"...
Conclusion bien cynique de la part d'un évêque.
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