LES CAPETIENS
LOUIS VII LE JEUNE, SA VIE

 

LOUIS VII ET ADELE DE CHAMPAGNE

Les noces de Louis VII et d'Adèle de Champagne sont célébrées le 13 novembre 1160. Après Aliénor d'Aquitaine et Constance de Castille, morte quelques mois plus tôt, cette troisième épouse va enfin donner au roi le fils et l'héritier qu'il attend depuis plus de vingt ans.

A quarante ans et après deux mariages (avec Aliénor d'Aquitaine, puis avec Constance de Castille), Louis VII est père de trois filles et désespère d'avoir enfin un fils qui pourra lui succéder sur le trône de France. Deux semaines seulement après la mort de la reine Constance, le 4 octobre 1160, le souverain annonce, à la stupéfaction générale, son intention d'épouser Adèle de Champagne, la soeur, âgée de vingt ans, des comtes Henri de Champagne et Thibaud de Blois.
Incroyable précipitation justifiée; d'après le biographe du roi, par la crainte qu'a celui-ci de laisser en mourant "le royaume de France sans héritier issu de sa semence" et par la nécessité de "pourvoir tant au salut de sa race qu'à la protection de la res publica". Trait de génie aussi, car en décidant aussi vite un mariage qui sera célébré quelques semaines plus tard, le 13 novembre, le Capétien réalise une opération doublement profitable.

Fille du comte Thibaud IV de Blois et de Champagne, décédé l'année précédente alors qu'il était brouillé avec le roi, Adèle a une dizaine de frères et soeurs. Ses aînés, les comtes Thibaud V le Bon de Blois et Henri 1er de Champagne, ont succédé à leur père à la tête de la puissante Maison bléso-champenoise. Du point de vue religieux, le souverain, en épousant la jeine fille, impose le silence à tous ceux, Maison de Blois en tête, qui lui reprochent de soutenir le pape Alexandre III et compromet tout regroupement politique des tenants de l'anti-pape Victor IV sous la bannière champenoise. Mais, surtout, face à la puissance du roi d'Angleterre Henry II Plantagenêt, il consolide d'un coup une précieuse alliance, qui, au vu de la défection du comte Thibaud et de la neutralité du palatin Henri pendant la guerre de Toulouse, manquera singulièrement d'efficacité.
Cependant, Louis VII ne se rapproche pas seulement des comtes Thibaud et Henri (qui épouseront en 1164 Marie et Alix de France, les filles nées de son union avec Aliénor d'Aquitaine) : le duc de Bourgogne, les deux principaux seigneurs du Perche, Rotrou III et Guillaume Gouet, le comte de Bar le Duc, terre d'Empire, deviennent également ses beaux-frères; le comte Guillaume III de Nevers et l'évêque de Troyes, ses oncles. Le bénéfice politique que le souverain est en droit d'attendre de son mariage précipité est immense. Mais il y gagne aussi une reine et l'espoir de voir naître un fils.
Louis VII semble s'attacher à sa jeune femme de vingt ans, ou du moins lui porter une estime particulière : comme son père Louis VI, il date les acte officiels de son règne du jour de son mariage. La reine Adèle prend sur lui un certain ascendant : elle obtient des charges éminentes pour ses frères; l'un d'entre eux, Guillaume aux Blanches Mains, deviendra évêque de Chartres, archevêque de Sens, principal conseiller de la Couronne, puis archevêque de Reims.

Enfin, le 21 août 1165, la reine met au monde un fils, baptisé Philippe et surnommé "Dieudonné", car il ne fait aucun doute que sa naissance résulte des aumônes et des prières adressées au Ciel! Pour le très pieux Louis VII, cet héritier mâle espéré depuis si longtemps fait figure d'insigne et miraculeuse récompense, d'apothéose d'une vie consacrée à la défense de l'Eglise et des pauvres.
Pendant l'accouchement de la reine Adèle, la Cour, la bourgeoisie et le peuple de Paris veillent toute la nuit en priant, s'apprêtant à célébrer l'arrivée de ce véritable don de Dieu, du petit "Dieudonné" qui montera sur le trône sous le nom de Philippe II Auguste, parce que né au mois d'août.
"Bien que la chambre de la reine fût close, des impatients ont pu y regarder par une fente de la porte et apercevoir l'enfant mâle" relate Pierre Riga, un étudiant qui a composé un petit poème en latin à l'occasion de l'événement. Il décrit la liesse qui, en pleine nuit, s'empare des rues de la capitale, où la foule allume des feux de joie, tandis que dans les églises on se répand en actions de grâces au son des carillons.
Les lettres de félicitation affluent à la Cour, comme celle du conseil de Toulouse célébrant "le verbe qui est né de vous, ce fils donné par Dieu qui, en le faisant naître, a daigné vous visiter". Ce raccourci entre l'étable de Bethléem et le palais de la Cité témoigne du rayonnement moral d'une royauté dont le titulaire semble plus que jamais s'identifier à cette image de Dieu sur terre qu'a naguère évoquée l'abbé Suger.

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