LES CAPETIENS
LOUIS VII LE JEUNE, SA VIE
Aliénor
d'Aquitaine
LOUIS VII ET ALIENOR D'AQUITAINE: UN HERITAGE PROVIDENTIEL
Avant de mourir, le duc Guillaume X d'Aquitaine a donné ses terres en garde à Louis VI et lui a confié sa fille Aliénor. En juin 1137, conformément aux dernières volontés de son puissant vassal, le roi décide de marier son fils, le futur Louis VII, à l'héritière d'Aquitaine. C'est ainsi que le beau duché va providentiellement venir agrandir le royaume de France.
En ce début de juin 1137, le roi, malade,
fuit la chaleur exceptionnelle et les odeurs fétides qui envahissent Paris.
Il se fait transporter jusque près de Melun, puis descend la Seine en barque
pour gagner son château de Béthisy, dans l'Oise. C'est là qu'il reçoit la visite
de messagers du duc Guillaume X d'Aquitaine, un de ses feudataires les plus
retors. Parti en pélerinage à Saint Jacques de Compostelle, celui-ci est mort
le 9 avril, jour du Vendredi Saint.
Cette mort est restée secrète, même,
et surtout, en Aquitaine : en conflit avec ses vassaux, le duc avait quitté
ses terres pour aller solliciter l'aide et la protection de Saint Jacques. Dans
ces conditions, aux derniers moments de sa vie, il n'a pu qu'être inquiet pour
l'avenir de son duché : son héritage doit aller à sa fille, Aliénor, âgée d'une
quinzaine d'années, qui, après sa disparition, risque d'être à la merci de celui
de ses vassaux qui voudrait s'approprier la couronne ducale
Avant de mourir, le duc d'Aquitaine a,
selon la coutume féodale, résolu de confier sa fille à son suzerain, le roi
de France, "pour la marier" et de remettre au Capétien "toute
sa terre pour la tenir en garde". Telle est la teneur du message transmis
à Louis VI. Peut-être des négociations ont-elles déjà eu lieu entre le souverain
et le duc Guillaume, que Suger, l'abbé de Saint Denis, a omis de mentionner
dans ses chroniques. Mais si un quelconque vassal enlevait Aliénor, il deviendrait
sur l'heure un puissant rival du roi, tant le duché est riche et vaste; il s'étend
de la Loire aux Pyrénées et de l'Auvergne à l'Atlantique.
Louis VI délibère
avec ses conseillers, mais prend vite sa décision : il promet de respecter la
volonté du défunt et de marier Aliénor à son fils Louis le Jeune, le futur Louis
VII, "dans son habituelle grandeur
d'âme", note Suger. Une grandeur d'âme également
motivée par l'occasion inespérée d'agrandir le royaume, qui plus est en y rattachant
le plus vaste fief de France et en faisant de son fils le plus puissant des
princes. Enfin cette "acquisition" pacifique du Poitou et de l'Aquitaine
permet de prendre en tenaille l'Anjou et les domaines du turbulent Geoffroy
Plantagenêt.
Les noces devant être célébrées à Bordeaux, Louis VI entreprend,
avec l'aide de Suger, de constituer le somptueux équipage d'apparat de son fils,
qui sera excorté par plus de cinq cents chevaliers. Le Capétien veut tenir son
rang, mais les fastes déployés doivent aussi impressionner les barons aquitains
enclins à profiter de la mort du duc Guillaume pour reprendre leur indépendance.
Louis le Jeune sera accompagné par les
plus puissants vassaux de son père; le comte Thibaud IV de Champagne, Guillaume
de Nevers, comte d'Auxerre et de Tonnerre, le comte Rotrou du Perche et le sénéchal
Raoul de Vermandois. L'abbé Suger sera lui aussi du voyage, pour assister le
prince; sa présence dit bien l'importance que revêt ce mariage. Louis VI remet
à ses fidèles quantités de richesses et de biens, leur interdit formellement
de piller les terres du duché pour éviter de s'y faire des ennemis.
Le pouvoir
ne devant pas rester trop longtemps vacant en Aquitaine, le cortège royal s'ébranle
vers le 15 juin. Le roi fait ses adieux à son fils, qu'il ne reverra plus, et
lui remet le cadeau destiné à Aliénor, une parure de bijoux. Chevauchant par
petites étapes, Louis le Jeune arrive le 1er juillet à Limoges. Avant de poursuivre
sa route, il fait ses dévotions. Mais il ne passe pas inaperçu parmi les hauts
dignitaires ecclésiastiques et laïques réunis pour les fêtes de Saint Martial.
Dès lors, la nouvelle de la mort du duc se répand comme une traînée de poudre.
Elle précède l'arrivée du prince à Bordeaux, mais il est trop tard pour enlever
l'héritière du duché : l'impressionnant cortège de Louis le Jeune n'est plus
très loin de la capitale religieuse de l'Aquitaine, où l'attendent la future
mariée, les évêques et les grands barons. Vers la mi-juillet, "nous
plantâmes nos tentes en face de la cité dont nous séparait le large cours de
la Garonne et là nous attendîmes que des navires nous fissent passer dans la
ville", relate Suger. Il va être temps de célébrer
les noces du futur Louis VII et de la duchesse Aliénor.
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