LES CAPETIENS
LOUIS VII LE JEUNE, SA VIE
Aliénor d'Aquitaine

 

LA PASSION D'ALIENOR D'AQUITAINE POUR SON ONCLE RAYMOND DE POITIERS

Menée à bonne distance par le pape Eugène II et l'abbé Bernard de Clairvaux, la deuxième croisade est une terrible désillusion pour Louis VII. Le roi de France y subit un triple échec : militaire, religieux et matrimonial. Dans l'affaire, le sombre souverain perd à la fois son armée et sa femme, la séduisante Aliénor d'Aquitaine, qui rencontre enfin un homme à sa mesure.

En dépit des apparences politiques, Antioche, place forte chrétienne de Turquie, est une ville orientale dont le prince est plus un sultan chrétien qu'un roi chevalier. Raymond de Poitiers, devenu Raymond d'Antioche, en est le souverain grâce à un habile mariage. Il est le plus jeune frère du père d'Aliénor, Guillaume X, duc d'Aquitaine et de Poitou.

En 1147, Aliénor est partie pour la croisade avec Louis VII, qu'elle a épousé à l'âge de quinze ans, en 1137. Après des mois de chevauchées et de réels dangers (l'armée du roi de France, mal commandée, a été agressée par les bandes turques et impliquées dans les intrigues des Byzantins), Aliénor est enchantée d'arriver enfin à Antioche. Elle y retrouve presque les charmes de la cour d'Aquitaine. Après des mois de peur, de sueur, de sang, de larmes, elle jouit pleinement des fêtes données chaque nuit dans les jardins dominant l'Oronte, de la musique enivrante, des subtilités de sa langue d'Oc, et des regards des hommes. Aliénor n'a que vingt cinq ans et déjà trop d'années perdues pour l'amour. Les chevaliers d'Antioche sont des Aquitains, des Poitevins de chez elle, dont certains ont été les vassaux les plus intimes de son père, Guillaume le Troubadour. Il y a aussi cet oncle, Raymond de Poitiers, qu'elle rencontrait enfant, au palais de l'Ombrière, à Belin près de Bordeaux, son premier château. Mais le grand garçon joueur est devenu "mieux fait de corps et plus beau qu'aucun de ses compagnons; il les dépasse tous au métier des armes et en science de chevalerie ", témoignent les chroniqueurs unanimes. Il est beau et invincible comme Lancelot. Très vite, Aliénor prend des airs de Guenièvre.

L'histoire du mariage de Raymond de Poitiers amuse Aliénor qui ne connaît que la version officielle. Raymond vient d'être armé chevalier par le roi d'Angleterre lorsqu'un mystérieux messager lui apporte un courrier du roi de Jérusalem. Les Francs de Terre Sainte le désignent comme le meilleur mari possible pour Alix d'Antioche, qui règne au nom de sa fille Constance, âgée de huit ans. Il est impossible de laisser sans homme et sans chef cette principauté menacée par l'émir Zenghi. Raymond semble seul capable de tenir tête à la fois à cette future épouse qui négocie âprement avec les Infidèles, et aux Infidèles eux-mêmes.
Une fois à Antioche, Raymond se fait d'abord reconnaître par le patriarche, et les deux hommes montent un piège. Le patriarche explique à Alix que le bel inconnu est un grand prince d'Occident, qu'il est amoureux d'elle et souhaite l'épouser. Troublée, elle accepte la cour empressée de Raymond.
Le jour prévu pour ses noces, alors que ses suivantes ajustent sa coiffure, Alix apprend que le mariage a déjà été célébré. Mais c'est Constance, sa fille encore enfant, que Raymond vient d'épouser ! Il est désormais maître de la place.
Bafouée, Alix se réfugie dans un château isolé pendant que Raymond, triomphant, n'a plus qu'à attendre l'heure de consommer ces noces barbares. C'est alors que survient Aliénor, sa troublante nièce.

A propos des dix jours qu'Aliénor et Raymond passent ensemble, les témoins sont unanimes, même dans leur silence. Les proches du roi, si loquaces avant l'arrivée à Antioche, n'écrivent plus rien. Comme s'ils devaient cacher l'indicible. Les autres accusent la reine d'une amitié "trop tendre" pour son oncle. Elle se comporte "mal", sa "mauvaise réputation" est établie. Ces insinuations sont trop concordantes pour ne pas être des preuves. Dans l'odeur suave et capiteuse des pistachiers en fleurs, Aliénor et Raymond ne se quittent plus. Même quand le roi de France est présent, il est exclu, puisque l'oncle et la nièce, à l'esprit de famille terriblement exigeant, ne se parlent qu'en langue d'Oc. Le ton monte entre les époux royaux. Alors que Louis veut aller à Jérusalem, Aliénor entend rester pour aider son cher Raymond à reprendre la ville d'Edesse. Quand le roi la menace de faire valoir ses droits d'époux, elle se moque : "Quels droits d'époux ? Nous sommes parents à un degré interdit par l'Eglise. Notre mariage est nul .".
Après onze années de mariage, elle annonce au clerc sa décision de divorcer .

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