LES CAPETIENS
LOUIS VII LE JEUNE, SA VIE
LA MORT DE LOUIS VII LE JEUNE
En 1179, Louis VII va sur ses soixante ans. Malade, fatigué et vieilli, il se résout à associer au trône son fils unique, le futur Philippe II Auguste, et à le faire solennellement couronner à Reims. Soucieux de l'avenir du royaume, le souverain pressent qu'il ne lui reste plus longtemps à vivre. Il va être rappelé à Dieu le 18 septembre 1180.
Le pape Alexandre III conseille à Louis VII d'associer
son fils au trône, de le faire couronner et d'astreindre les grands du
royaume à lui prêter serment. Le roi n'est pas pressé, bien
que depuis qu'il a passé la cinquantaine il se sente fatigué et
vieilli, et qu'il ait été victime, en 1177, d'une première
attaque de paralysie. Il ne s'y résout qu'en 1179, l'année de
la majorité de son fils, le futur Philippe II Auguste, qui doit fêter
ses quatorze ans le 21 août. Le souverain convoque les grands seigneurs ecclésiastiques
et laïques au palais épiscopal de Paris et "leur
annonce qu'il veut, avec leur conseil et leur assentiment, faire couronner son
très cher fils, Philippe, le jour de la prochaine fête de l'Assomption.
Après avoir entendu la volonté royale, tous s'écrient d'une
voix unanime : 'Soit! Soit!' Et sur cette acclamation fut prononcée la
clôture de l'assemblée", rapporte le
chroniqueur Rigord de Saint Denis.
Quelques jours avant la date prévue
du sacre, le souverain et son fils se rendent à Compiègne, étape
sur la route de Reims et séjour apprécié des Capétiens,
tous grands chasseurs. C'est là qu'un événement insolite
va empêcher les cérémonies de se dérouler le 15 août.
Alors qu'il poursuit un sanglier dans le bois de Cuisse
la Motte, le prince Philippe s'éloigne de ses compagnons. Surpris par
la nuit, il se perd et erre prendant trente six heures. Il est enfin retrouvé
par un voyageur et ramené à sa famille, bouleversé par
cette aventure, mourant de faim et de fatigue. Au cours des semaines suivantes,
il reste prostré, tant le choc nerveux a été violent, et
tous le croient perdu. Pour l'heure, il n'est plus question de sacre. Est-ce
un funeste présage? Est-ce l'oeuvre de Satan, "cet ennemi qui se
complaît à corrompre les bonnes semences", comme l'affirmera
plus tard Guillaume le Breton, auteur de la Laus Philippi?
Au désespoir,
le roi songe à se rendre sur la tombe de Thomas Becket, le martyr de
Cantorbéry canonisé en 1173, où se sont produits bien des
miracles. Seul l'archevêque, à qui il a apporté soutien
et protection lors du conflit l'opposant au roi d'Angleterre Henry II Plantagenêt,
lui semble pouvoir intercéder en faveur de son fils. Il se met aussitôt
en marche, accompagné de quelques fidèles, dont le parrain du
jeune malade, le comte Philippe de Flandre. A la fin du mois d'août,
foulant pour la première fois le sol de la Grande Ile, il est accueilli
à Douvres par son vieil adversaire le roi Henry II dans une grande magnificence.
Ensemble, les souverains se rendent à Cantorbéry, où, pendant
deux jours, ils se recueillent longuement pour demander la guérison de
l'héritier de la Couronne de France. Curieusement, le Plantagenêt
prie pour le fils de son ennemi d'hier, qui plus est sur la tombe d'un saint
dont on l'accuse d'avoir commandité l'assassinat! Avant de partir, Louis
VII fait don au monastère de Cantorbéry de sa coupe d'or personnelle
et attribue aux moines le revenu annuel de cent muids de vin du domaine royal.
En septembre, le roi est de retour à
Paris, après avoir fait étape à l'abbaye de Saint Denis
pour se recueillir devant les reliques. Brisé par l'émotion et
épuisé par le voyage, il est pris d'un refroidissement qui provoque
une hémiplégie droite et le prive de la parole. Mais il n'a pas
souffert en vain : le prince Philippe est rétabli! Le souverain a surtout
eu le temps de donner des ordres de célébration du sacre et de
faire rédiger l'édit convoquant les grands du royaume à
Reims pour la Toussaint 1179. Ce jour-là, il ne peut assister aux cérémonies.
Désormais cloué au lit, il devient le spectateur de la dernière
année de son règne; pendant que Philippe Auguste agit en souverain,
rompant dans plusieurs domaines avec sa politique. Au printemps 1180, le jeune
roi enlève le sceau royal à son père; afin "que
Louis ne pût, à l'insu de son fils décréter qoui
que ce fût dans le royaume", précise
un chroniqueur anglais. En avril, il épouse sans le consentement paternel
Isabelle de Hainaut, la nièce du comte de Flandre.
Souverain privé
de tout pouvoir, Louis VII s'éteint le 18 septembre 1180, en son palais
parisien de l'Ile de la Cité, à l'âge de soixante ans et après
quarante trois ans de règne. Pieux et simple jusqu'au bout, il a dédaigné
la nécropole royale de Saint Denis, préférant être
inhumé dans l'église de l'abbaye cistercienne Notre Dame du Barbeau,
qu'il a fondée près de Fontainebleau. Gravée sur sa tombe,
son épitaphe sonne comme une dernière recommandation à
son fils : "Celui à qui tu
survis, tu lui survis successeur de sa dignité. Tu manques à la
lignée si tu manques à sa renommée".
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