HENRI II, CHEF D'ETAT
        
    
    

        
 
            
L'INCIDENT DU PRE AUX CLERCS
(13 mai 
            1558)

Le 13 mai 1558, de nombreux protestants 
se rassemblent au Pré aux Clercs pour chanter des psaumes. D'autres manifestations 
ont lieu dans les jours qui suivent. Bien que pacifiques, elles suscitent l'indignation 
des catholiques et de la Sorbonne, ainsi que la colère d'Henri II, de plus en 
plus hostile à la Réforme et à ses partisans. Cette affaire aura indirectement 
pour conséquence l'arrestation de François d'Andelot, qui sera déchu de sa charge 
de colonel général des gens de pied.
La terrible répression dont ils sont victimes 
ne parvient pas à faire revenir les protestants sur des opinions religieuses 
que l'orthodoxie religieuse juge hérétiques. Certains en sont même confortés 
dans leur attachement à la Réforme et aux idées de Calvin. Au mois de mai 1558, 
quelques uns d'entre eux s'enhardissent à se réunir au Pré aux Clercs, près 
de l'abbaye de Saint Germain des Prés, pour chanter des psaumes. Le 13 mai, 
spontanément, ils sont de quatre à six mille à s'y retrouver de nouveau, à défiler 
en procession en chantant les psaumes des condamnés au bûcher. Jeanne d'Albret, 
fervente adepte de la Réforme, est là, avec son époux Antoine de Bourbon Vendôme, 
le roi de Navarre, qui chevauche en tête du cortège en compagnie de plusieurs 
gentilshommes.
Le lendemain, le Pré aux Clercs est le 
théâtre des mêmes événements; et encore le surlendemain, ce qui provoque l'indignation 
des catholiques. La faculté de Théologie de la Sorbonne ordonne que des prières 
solennelles soient dites pour expier "la 
souillure du Pré aux Clercs", et les écoliers de 
l'Université devront y assister, porteurs de cierges. Elle dénonce auprès du 
Parlement cette assemblée et les autres réunions que tiennent les protestants 
dans certaines rues de la capitale, et fait pression pour qu'on les interdise. 
Bien que ces manifestations soient des plus pacifiques, les autorités acceptent 
d'intervenir, au prétexte que certains participants sont armés, les armes mises 
en cause étant les épées que les gentilshommes portent toujours au côté!
Le 
18 mai, le Parlement rend un arrêt interdisant le rassemblement de "tant 
d'hommes que de femmes, dont la plupart sont en armes et chantent publiquement 
à haute voix des chansons concernant le fait de la religion et tendant à sédition 
et commotion populaire et perturbation du repos et tranquillité publics". 
Mais une nouvelle manifestation se déroule le lendemain, jour de l'Ascension. 
Cette fois, elle est illégale, et la police intervient, la dispersant brutalement. 
Plusieurs personnes sont arrêtées, qui seront progressivement relâchées au fil 
des jours suivants, et l'accès au Pré aux Clercs est interdit sous peine de 
mort. L'affaire ne va pas plus loin : Henri II veut éviter qu'elle ne dégénère 
en révolte, mais, à l'avenir, il est déterminé à se montrer plus intransigeant 
à l'égard des protestants.
Pendant ce temps, à la Cour, François d'Andelot, 
colonel général des gens de pied (l'infanterie), a été dénoncé par le cardinal 
de Lorraine, Charles de Guise, pour avoir adhéré à la Réforme. Le 18 mai, Henri 
II, fou de rage,  lui reproche pêle mêle de faire prêcher la nouvelle doctrine, 
d'avoir assisté aux manifestations du Pré aux Clercs, de n'être pas allé à la 
messe durant l'expédition de Calais contre les Anglais, de faire circuler des 
livres "suspects". Andelot nie pour le Pré aux Clercs, mais reconnaît 
la véracité des trois autres accusations. Il déclare vouloir garder sa conscience 
sauve, abandonnant au roi son corps et ses biens. Fils du maréchal Gaspard de 
Châtillon, neveu du connétable Anne de Montmorency, frère de l'amiral Gaspard 
de Coligny et du cardinal Odet de Châtillon, il compte parmi les plus grands 
seigneurs du royaume : pour le remettre dans le chemin de l'orthodoxie, on le 
fait arrêter et enfermer au château de Melun.
Un temps, Andelot reste sur 
ses positions et fait baptiser sa fille, nouvellement née, à l'Eglise réformée. 
Puis il commence à fléchir et consent à garder deux jours près de lui un docteur 
en théologie, à qui il expose ses croyances. Enfin, il écrit au roi qu'il est 
prêt à lui obéir et accepte d'assister à une messe catholique. Succombe-t-il 
à un moment de faiblesse? Ou tente-t-il de duper ses détracteurs? Sa charge 
de colonel général de l'infanterie lui a été enlevée, mais en juillet, après 
un semblant de rétractation, il est libéré. Cependant il n'a pas renoncé à la 
Réforme : après avoir été admonesté par les pasteurs de Paris pour sa compromission, 
il promet de s'efforcer désormais de se donner à Dieu sans reserve.
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