CLOVIS ET LES PERSONNALITES
THEODORIC ACCUEILLE LES ALAMANS MIS EN DEROUTE PAR CLOVIS
Après avoir été soumis à la bataille de Tolbiac, en 496, les Alamans, qui séjournent au nord est des Gaules, se soulèvent de nouveau contre le pouvoir franc. Défaits, une fois encore, par Clovis, en 506, ils s'enfuient vers le Danube, qu'ils franchissent avant d'être accueillis avec autant de mansuétude que d'intérêt par Théodoric, le roi des Ostrogoths d'Italie.
La confédération des Alamans regroupe
diverses tribus germaniques du nord est de l'Europe. D'abord établi sur le cours moyen de
l'Elbe, ce peuple gagne progressivement les régions situées entre le Main et le lac de
Constance, l'Alsace et la Suisse orientale. De là, ils cherchent à conquérir l'Italie
du Nord et lancent de fréquentes incursions en territoire franc. Vaincus par Clovis lors
de la fameuse bataille de Tolbiac, en 496, ces barbares ont accepté la suzeraineté des
Francs et ont constitué le duché d'Alémanie.
Bien que sans chef ni autorité suprême, et malgré le serment de fidélité après
Tolbiac, les Alamans ont envahi la haute Italie, la Franche Comté et une bonne partie de
la Suisse. Vers 505, ils se soulèvent une nouvelle fois contre le joug des Francs. Mais
les armées de Clovis sont les plus fortes et leurs guerriers les plus vaillants sont
décimés. C'est dans le désordre le plus complet que les survivants prennent la fuite.
Après avoir dépassé les sources du Rhin, ils franchissent le Danube et pénètrent en
Rhétie (une partie de l'actuel Tyrol et de la Suisse), sur les terres de Théodoric, roi
des Ostrogoths.
Voyant arriver ce peuple décimé,
affaibli et terrifié, poursuivi par la vindicte mérovingienne, Théodoric envoie à son
parent du nord une missive implorant sa pitié et réclamant la grâce pour les derniers
des Alamans. En premier lieu, le roi des Ostrogoths fait valoir à Clovis que les fugitifs
sont désormais sur ses terres, et donc sous sa grâce. Aussi, il menace d'intervenir si
les violences des Francs débordent ses frontières. Par ailleurs, il prêche la
modération comme la meilleure des conseillères et l'attitude la plus judicieuse après
une victoire si brillante. Enfin, il constate que le peuple alaman, n'étant gouverné par
aucun chef digne de ce nom, est dans l'incapacité de se révolter une fois de plus, ou de
menacer de quelque façon les intérêts du roi franc.
Mais ces deux derniers arguments semblent à Clovis pour le moins spécieux. Déjà, le
roi des Francs a fait preuve de modération. Après la bataille de Tolbiac, il a accepté
de signer une paix honorable avec ceux qu'il venait d'écraser. Par ailleurs, les Alamans
ne disposent plus d'un gouvernement royal depuis 496. Ce qui ne les a pas empêchés de se
soulever. En d'autres termes, l'attitude si vivement recommandée par Théodoric a déjà
fait preuve de son inefficacité.
Derrière ces mots, les motifs qui
guident le roi des Ostrogoths ne sont pas un secret et Clovis les a fort bien compris. Les
Alamans massacrés, ce serait fini de la "zone tampon" sur laquelle ils sont
établis, qui constitue un frein indispensable à l'hégémonie du roi mérovingien. Et
nul n'ignore la sourde rivalité qui oppose Francs et Ostrogoths. Si Théodoric est fort
préoccupé par le sort d'une partie des Alamans, il abandonne à leur triste sort ceux
qui sont restés au nord du Danube. Singulièrement, il n'hésite pas, par
l'intermédiaire de son propagandiste, à s'arroger le titre d'Alamannicus
("Vainqueur des Alamans"). Alors qu'il n'est pour rien dans leur défaite et
leur exode.
Si l'intervention du roi d'Italie porte finalement ses fruits, c'est parce que
l'équilibre des force n'est pas encore en faveur de Clovis et que celui-ci ne peut se
permettre, pour le moment, d'attaquer de font le pouvoir ostrogoth. Aussi le roi Franc
doit se contenter des récits épiques entonnés par un citharède romain, envoyé par son
rival et choisi parmi les plus brillants d'Italie. Mais ces quelques notes, égrenées
lors des banquets qui se déroulent à Paris ou à Soissons, suffiront-elles à amadouer
la fougue conquérante du Mérovingien?
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