FAGON, PREMIER MEDECIN DU ROI SOLEIL
Le jour de la Toussaint 1693, Guy
Crescent Fagon est officiellement nommé premier médecin du roi. Il hérite d'un
titre prestigieux, mais aussi d'un patient souffrant de nombreuses maladies
chroniques. Cinquième et dernier des premiers médecins du roi, âgé comme lui
de cinquante cinq ans, il est réputé pour sa compétence et pour sa droiture.
Lorsqu'elle était chargée de l'éducation des enfants de
Louis XIV et de Madame de Montespan, Madame de Maintenon a apprécié les compétences
et la discrétion de Guy Crescent Fagon, médecin de ses petits protégés. Devenue
l'épouse de Sa Majesté, elle n'a pas oublié le praticien, et c'est elle qui
est à l'origine de sa nomination à la charge prestigieuse de premier médecin
du roi. "Madame de Maintenon, qui voulait tenir le
roi par toutes les avenues, et qui considérait celle d'un premier médecin habile
et homme d'esprit comme un des plus importantes, à mesure que le roi viendrait
à vieillir et sa santé à s'affaiblir, sapait depuis longtemps d'Aquin",
rapporte le duc de Saint Simon dans ses Mémoires. Pour la marquise, Antoine
d'Aquin a pour principal défaut d'être devenu premier médecin du roi, en 1672,
grâce à l'intervention de Madame de Montespan, qui était alors la favorite en
titre. En outre, depuis quelque temps, il agace Sa Majesté, que, trop obséquieusement
courtisan, avide de charges et de bénéfices, il presse de nommer son fils archevêque;
ce qui lui vaut d'être disgracié en 1693. En ces circonstances, Madame de
Maintenon n'a aucun mal à imposer son protégé, avançant ses qualités de praticien,
son expérience, ses connaissances étendues en botanique et son art éprouvé de
soigner avec les plantes médicinale. Le mardi 1er novembre 1693, jour de la
Toussaint, Louis XIV, dès son lever et à la surprise générale, annonce à Fagon
son avancement immédiat.
Le choix de Madame de Maintenon se révèle cependant fort
judicieux. Les compétences de Fagon sont reconnues dans tout le royaume et sa
réputation a même franchi les frontières. "Fagon étaient
un des beaux et des bons esprits de l'Europe, curieux de tout ce qui avait trait
à son métier, grand botaniste, bon chimiste, habile connaisseur en chirurgie,
excellent médecin et grand praticien. Il savait d'ailleurs beaucoup; point de
meilleur physicien que lui; il entendait même bien les différentes parties de
mathématiques. Très désintéressé, ami ardent, mais ennemi qui ne pardonnait
point, il aimait la vertu, l'honneur, la valeur, la science, l'application,
le mérite", constate Saint Simon. Un tel homme ne peut que plaire
à Louis XIV, qui apprécie la droiture et la compétence en toutes circonstances.
Lui qui perd toute sa majesté et sait se faire humble devant la maladie et la
souffrance se sent d'emblée totalement en confiance avec son nouveau premier
médecin. Au fil des années, des relations amicales se nouent entre les deux
hommes, sans que jamais Fagon ne cherche, comme son prédécesseur, à y gagner
des faveurs. Il sait toujours, affirme le très protocolaire Saint Simon, rester
à sa place et, par là même, la garder!
A cinquante cinq ans, le Roi Soleil n'est pas en excellente
santé. Depuis plus de dix ans, il souffre de la goutte, nommée alors le "mal
noble" à cause des victimes qu'elle fait dans les rangs de l'aristocratie.
Avec le temps, les crises répétées l'empêchent de marcher et l'obligent à se
déplacer en fauteuil à roulettes dans Versaille. Pour ses chères promenades
dans le parc, il emprunte un chariot à fauteuil spécialement conçu à cet effet
et suit désormais la chasse en calèche légère. Fagon a beau tenter de le soulager
en lui concoctant de nombreux remèdes, jamais il ne parviendra à prévenir ni
à guérir ces attaques invalidantes. Le Roi Soleil est également atteint par
deux affections communes aux gentilshommes de son temps, les hémorroïdes et
les problèmes de transit intestinal dus aux chevauchées, au manque d'exercice
et à une alimentation pauvre en fibres. Pour y remédier, Fagon le fait purger
tous les mois, et parfois plusieurs jours de suite. Louis XIV supporte tous
les traitements qu'on lui prescrit avec sagesse et vaillance. Il accepte sans
renâcler les saignées, panacée du temps, qu'on lui inflige régulièrement par
précaution! Jamais, le monarque absolu et d'essence divine ne se plaint, ni
ne fait de reproches à son médecin : il tient à rester un patient ordinaire
et obéissant.
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