LES CAPETIENS
PHILIPPE IV
LE BEL, CHEF D'ETAT
Le problème
de la Flandre
AU BORD DE LA RUPTURE
(14 avril 1313)
En juillet 1312, à Pontoise, un nouvel accord a été conclu entre Philippe le Bel et le comte de Flandre, Robert de Béthune. Mais Louis de Nevers, l'héritier du comte, refuse de s'y plier et, le 14 avril 1313, va entrer en rébellion ouverte. Au début de l'été suivant, la situation se sera envenimée au point que le Capétien et les Flamands seront une fois encore au bord de la rupture.
En ce jour de la Pentecôte 1313, Philippe le Bel donne des fêtes somptueuses à Paris. C'est que le gendre et la fille du Capétien, le roi Edouard II d'Angleterre et son épouse la reine Isabelle, sont venus assister à l'adoubement de l'héritier du trône de France, Louis de Navarre, le futur Louis X le Hutin, et de son frère cadet, le futur Philippe V le Long. Par ailleurs, une nouvelle croisade est en préparation, prêchée par le cardinal Nicolas de Fréauville, légat du pape Clément V. Alors que tous les grands vassaux sont présents à l'occasion de cet événement, l'absence du comte de Flandre Robert de Béthune est fort remarquée.
Officiellement, Robert de Béthune s'est fait excuser,
prétextant qu'il attend que les préparatifs de l'expédition en Terre Sainte
soient plus avancés pour prendre lui aussi la croix. Mais personne n'est dupe,
sachant que le traité de Pontoise de juillet 1312 est loin d'avoir définitivement
résolu les affaires de Flandre et laisse bien des incertitudes en ce qui concerne
les relations entre le roi et son vassal flamand.
Louis de Nevers, le fils
du comte de Flandre, refuse de s'incliner devant l'accord signé à Pontoise.
Il s'oppose de plus en plus ouvertement à son père et au roi, ce qui lui vaut
le soutien des artisans et du peuple du comté. Philippe le Bel s'en inquiète
suffisamment pour réunir d'urgence une commission où siègent des hommes sûrs
de son Conseil, tels Guillaume de Nogaret et Enguerrand de Marigny, qui condamne
Nevers pour félonie. Par ailleurs, le Capétien est furieux de constater que
la ville de Bruges n'a toujours pas rasé ses murailles et que maintes fortes
sommes levées par les échevins pour le règlement de l'indemnité de guerre ont
été détournées au profit des municipalités. Il convoque le comte de Flandre
et les procureurs des villes flamandes, qui sont sommés de payer au plus vite
et de s'assurer de le destruction des fortifications brugeoises. Dans le même
temps, il tente de briser l'union des bourgeoisies urbaines en favorisant Gand
et Ypres. Mais les villes font de la résistance, particulièrement Bruges qui
se sent soutenue par Louis de Nevers, lequel n'a de cesse de sillonner la Flandre
et de haranguer le petit peuple en prêchant la révolte contre le roi.
Le 14 avril, Louis de Nevers entre en rébellion ouverte
contre Philippe le Bel en protestant publiquement, à l'église des dominicains
de Gand, contre les traités d'Athis sur Orge et de Pontoise, affirmant, non
sans mauvaise foi, qu'on les lui a fait ratifier en lui en dissimulant le contenu...
En outre, il lance, et fait largement diffuser en Flandre et dans le Hainaut,
un appel au pape Clément V et à l'empereur Henri VII, qu'il qualifie (véritable
camouflet pour le Capétien) de "souverain de tous les princes temporels".
Son attitude renforce la détermination des Brugeois, qui en profitent pour décider
de ne pas abattre l'enceinte de leur ville.
Eu égard au comportement de Louis
de Nevers, qui reste l'héritier du comté de Flandre, Philippe le Bel ne peut
se contenter d'une simple entente avec Robert de Béthune : outre le fait que
le père rique de se raviser et de faire cause commune avec le fils, s'il venait
à mourir le comté reviendrait de droit au rebelle. Le roi décide d'en appeler
à l'arbitrage du pape, qui ne peut que lui être favorable étant donné qu'ils
entretiennent d'excellentes relations. Il est convenu qu'une nouvelle conférence
se tiendra à Arras pour tenter de régler définitivement la question flamande
: et, cette fois, le souverain affirme ne plus vouloir se contenter de "bonnes
paroles ni d'intentions vagues". L'évêque d'Arras, qui doit accueillir
les négociateurs, reçoit délégation de l'archevêque de Reims, de l'évêque de
Senlis et de l'abbé de Saint Denis pour lancer une sentence d'interdit sur la
Flandre si celle-ci refuse de se soumettre à l'autorité royale. Dans le même
temps, des troupes levées dans l'ensemble du royaume sont massées à Péronne.
En tant que duc de Guyenne, le roi d'Angleterre fournit le renfort d'un contingent
de Gascons et ordonne à sa flotte de prendre position au larges des côtes de
Flandre. L'avertissement est clair : ou les Flamands se plient aux traités jusqu'ici
conclus, ou ils auront la guerre.
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