LES CAPETIENS
PHILIPPE IV LE BEL, CHEF D'ETAT

 

LE TRAITE DE PARIS AVEC HENRI VII DE LUXEMBOURG
(26 juin 1310)

Le roi Philippe le Bel et l'Empereur Henri VII de Luxembourg entretiennent des relations amicales. Du moins en apparence, car leur intérêt mutuel est d'éviter le conflit et de régler les litiges qui subsistent entre le royaume de France et l'Empire. Le 26 juin 1310, la signature du traité de Paris établira, provisoirement, les bases d'une sorte de modus vivendi, en particulier en rémédiant à la question du comté de Bourgogne.

Philippe le Bel et le comte Henri de Luxembourg sont de la même génération et se connaissent depuis longtemps. Bien que le Luxembourg soit terre d'Empire, le comte est vassal du roi de France. Au plan personnel, l'homme est plus français que germanique. A la fois par sa culture, il ne parle pas d'autre langue que le français, et par ses goûts, qui le portent vers les tournois, les trouvères et les romans de chevalerie. Mais surtout parce qu'il a passé sa jeunesse à Paris et a été armé chevalier par le Capétien en personne. La Maison de France a joué un rôle important dans sa réconciliation avec le duc de Brabant après une terrible bataille où son père et ses oncles ont péri. Marie de Brabant, soeur du duc et reine douaière de France, l'a marié avec sa nièce Marguerite; ce qui leui a valu de devenir par alliance du comte Louis d'Evreux, demi-frère de Philippe le Bel.

Le 27 novembre 1308, Henri de Luxembourg a été élu à l'unanimité au trône impérial, sous le nom d'Henri VII, grâce au soutien de son frère Baudoin, archevêque-électeur de Trêves, et à la neutralité bienveillante du pape Clément V, qui est pourtant l'allié du Capétien. Cette élection et l'échec de la candidature de son frère Charles de Valois ne sont pas pour plaire à Philippe le Bel, qui tente cependant de masquer son amertume tout en oeuvrant dans la coulisse pour retarder autant que possible le couronnement impérial. Le 6 janvier 1309, Henri VII a ceint la couronne d'argent d'Allemagne; mais il lui faudra attendre le 29 juin 1312 pour être sacré Empereur à Rome et devenir le chef de file de la chrétienté d'Occident.
En apparence, les deux souverains entretiennent de bonnes relations. Quelques mois seulement après son élection, Henri VII charge le comte Jean de Namur, fils du comte de Flandre Gui de Dampierre, et le duc de Brabant d'assurer Philippe le Bel de ses excellentes dispositions à l'égard de la monarchie capétienne. Ses émissaires sont reçus par deux diplomates désignés par le roi : Louis de Clermont, petit-fils de Saint Louis, tout dévoué à son royal cousin, et le légiste Pierre de Latilly, défenseur intransigeant des intérêts du Capétien. Au printemps 1310 s'ouvrent des négociations visant à procéder au règlement des litiges qui subsistent entre le royaume de France et l'Empire.

Signé le 26 juin, le traité de Paris règle la question la plus urgente, celle du comté de Bourgogne, fief impérial échu à Philippe de Poitiers, le futur Philippe V le Long, deuxième fils du Capétien. Henri VII reconnaît Philippe de Poitiers comme comte de Bourgogne; tandis que Philippe le Bel reconnaît le comté comme terre d'Empire et accepte de faire hommage au roi des Romains, lequel hommage est différé jusqu'après le voyage que le comte Philippe doit effectuer en compagnie de l'Empereur. Ce sera le seul problème réglé et la fin des concessions réciproques. Chacun traîne les pieds pour ratifier le traité, et plusieurs incidents mineurs servent de prétexte pour que la rencontre personnelle entre le roi et l'Empereur n'ait pas lieu.
Bien que pressé par Clément V, Philippe le Bel ne ratifie pas le traité de Paris. Alors qu'il multiplie les interventions dans les régions frontalières sous autorité impériale, il se plaint que des péages aient été établis sur le Rhône conformément aux instructions d'Henri VII. De son côté, ce dernier proteste contre l'ingérence française, en particulier à Lyon, ville impériale, où le prince Louis de Navarre, le futur Louis X le Hutin, a conduit une armée afin de contraindre le nouvel archevêque, Pierre de Savoie, à se soumettre à l'accord de pariage (prévoyant des droits égaux pour le roi et l'archevêque) conclu avec son prédécesseur. D'une manière générale, l'Empereur considère qu'il est de son devoir de contrebalancer la supériorité du Capétien et de limiter l'expansion française, préoccupation que partage le pape. Dès la fin de l'année 1310, les relations entre les deux souverains sont au plus bas. A la Cour de France, certains trouvent que le roi mène trop d'affaires à la fois (contre le Temple, en Flandre, afin d'obtenir le procès de Boniface VIII) d'autant que, comme la question impériale, ces affaires ne semblent pas près d'aboutir.

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