LES CAPETIENS
LOUIS IX, CHEF D'ETAT

 

LE MASSACRE DES INQUISITEURS D'AVIGNONET
(1242)

Le 28 mai 1242, A Avignonet, en Lauragais, l'Inquisition mise en place à partir de 1229, connaît ses premiers martyrs. Descendue du nid d'aigle de Montségur, une troupe de conspirateurs mandatés par le comte de Toulouse s'apprête à venger les dizaines de cathares qui ont déjà péri sur le bûcher.

A la nuit noire, les assassins ont quitté leur abri près d'Avignonet pour s'introduire dans la ville. Ils ont traversé le bourg jusqu'au château, protégés par l'ombre complice des ruelles. Ici, comme partout dans la région, chacun sait ce qu'il va advenir. La nouvelle s'est répandue avant même que n'arrivent les assassins. Mais il ne s'est trouvé personne pour prévenir leurs futures victimes.
Aux portes de la citadelle, Raymond d'Alfaro, bayle du comte de Toulouse, veille. Des pas, un signal : les portes s'ouvrent. On se glisse par les couloirs jusqu'à la chambre où reposent les Inquisiteurs. Alors que la lourde porte tremble sous les coups de hache, les religieux sont soudainement tirés de leur sommeil. Les envoyés du pape ne tentent rien pour échapper à leur destin. Tombés à genoux ils entonnent le Salve Regina dont les notes se mêlent aux craquements de l'huis qui ne tarde pas à céder. Puis c'est la curée. Les meurtriers se ruent dans la pièce. On se dispute l'honneur de donner les coups mortels. Chacun ici a un parent ou un ami à venger. On tue, puis on mutile. On pille, enfin, les corps sans vie. Et comme ils sont arrivés, les assassins repartent vers leur refuge de Montségur.

Il faut dire que les Inquisiteurs ne sont guère prudents. Ils vont de ville en ville, là où la présence d'hérétiques cathares est suspectée. Ce tribunal est dirigé par frère Guillaume Arnaud, de Montpellier, assisté du franciscain Etienne de Saint Thibéry. Deux dominicains les accompagnent, ainsi qu'un représentant épiscopal. Vient enfin le chanoine de Saint Etienne de Toulouse, Raimond de Costiran. Avec un notaire et quatre huissiers, la petite troupe compte onze personnes. Mais pas d'escorte... Or, si le calme est revenu, le pays reste dangereux pour les représentants de l'Eglise de Rome.
Le périple des Inquisiteurs les a amenés à Avignonet, à quarante kilomètres de Toulouse, une région qui regorge d'hérétiques. Arrivés la veille de l'Ascension, ils ont pris leurs quartiers au château comtal, propriété de Raimond de Toulouse, où ils ont été accueillis par le bayle Raimond d'Alafaro. Ce dernier a déjà reçu les ordres de son seigneur et a convoqué sans tarder un chevalier de Montségur.
Désireux d'affaiblir l'influence du pape, Raimond VII est ici plus habile que ne l'a été son père. Plutôt que de faire assassiner les envoyés du pape par un de ses hommes, comme Raimond VI l'a fait en 1208, il préfère laisser le champ libre aux rebelles déclarés, quitte à leur donner un coup de pouce en les laissant entrer de nuit dans son château. Le message de Raimond d'Alfaro parvient à Pierre Roger de Mirepoix, commandant de la garnison de Montségur basée à près d'une centaine de kilomètres de là. Cinquante chevaliers et sergents se mettent en route vers Avignonet. Ils sont rejoints par des renforts. Toute cette partie du Languedoc semble être au courant d'un complot que seuls les Inquisiteurs continuent d'ignorer.

La mort des Inquisiteurs est le signal du soulèvement. Raimond VII, qui n'en a cure, est aussitôt excommunié par l'Inquisition ainsi que par l'archevêque de Narbonne. Le territoire du Razès, celui de Termes, Albi et même Nimes se rallient au comte de Toulouse. Ses troupes manoeuvrent vers les cités royales de Carcassonne et Béziers alors qu'il entre à Narbonne, début août 1242. Mais l'aide attendue du roi d'Angleterre n'arrive pas. Ce dernier, débarqué à Royan, fin juillet, a été mis en échec par les armées du roi de France et a dû se replier sur Bordeaux. Peu à peu, les alliés de Raimond de Toulouse font défection.
L'insurrection est un échec et personne ne veut voir revenir les troupes de Louis IX, comme aux premiers temps de la croisade contre les Albigeois. Le comte de Toulouse se soumet à son tour. En janvier 1243, il signe la paix de Lorris par laquelle il s'en remet au roi et s'engage à respecter les clauses du traité de Meaux-Paris.
Mais le massacre d'Avignonet, dont les coupables se sont réfugiés à Montségur, n'est pas oublié. La reine mère, Blanche de Castille, ordonne la destruction de ce nid de résistance. Fin mai 1243, sous la conduite du Sénéchal Pierre des Arcis, l'armée royale se dirige lentement vers le dernier bastion du catharisme.

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