LES CAPETIENS
LOUIS IX, CHEF D'ETAT

 

SIDON, DERNIERE ETAPE EN TERRE SAINTE
(Juin 1252 - Février 1253)

Au mois de juin 1252, Louis IX quitte Jaffa pour Sidon, où il séjournera jusqu'en février de l'année suivante. Après avoir fait ensevelir chrétiennement les victimes du massacre perpétré par les troupes du sultan de Damas et d'Alep, il va restaurer les défenses de la cité et tenté de réduire l'ennemi par les armes. Faute d'une victoire militaire, il devra se contenter d'un traité de paix qui scellera son échec à reconquérir le royaume de Jérusalem et annoncera la fin de la septième croisade.

Au mois de mai 1253, la ville côtière de Sidon est dévastée par les troupes d'al-Nasir, le sultan de Damas et d'Alep. Les ouvriers qui, sur ordre du roi, travaillent à la restauration des remparts sont massacrés. La garnison franque est contrainte de se réfugier dans le "château de mer", bâti sur une presqu'île, afin de ne pas subir le même sort. Sitôt qu'il apprend le péril encouru par ses hommes, Louis IX quitte Jaffa et, empruntant la route du littoral, se précipite à leur secours.
Au mois de juin, le Capétien arrive à Sidon, que l'ennemi vient d'abandonner. Son premier souci est de faire ensevelir chrétiennement les victimes. N'écoutant que son coeur, il n'hésite pas à participer à ce pénible labeur. "Lui même, en personne, portait les corps tout puants pour les mettre en terre dans des fosses, sans se boucher le nez, et les autres se bouchaient le nez", relate le sénéchal de Champagne Jean de Joinville dans sa Vie de Saint Louis. Pendant ce temps, le gros de l'armée se rend à marche forcée vers Baniyas, aux sources du Jourdain, pour y affronter al-Nasir. Mais l'opération échoue et les guerriers francs doivent se résoudre à faire retraite vers Tyr, puis à rejoindre Sidon.

Dès la fin du mois de juin, Louis IX entreprend de doter Sidon d'une nouvelle ceinture de fortifications. Pour ce faire, il ne ménage pas ses deniers, comme il l'a fait pour Saint Jean d'Acre, Césarée et Jaffa, pour lesquelles 95 000 livres, prélevées sur le Trésor royal, ont été affectés aux travaux de restauration des remparts. Les premiers efforts sont concentrés sur le "château de mer", qui protège la ville du côté du littoral. Puis, celui-ci est relié par une solide muraille à une seconde et nouvelle citadelle, le "château de terre".
Tout comme lors de ses séjours dans les autres cités de Terre Sainte, le roi reçoit plusieurs ambassades venues solliciter une alliance avec les Francs, qui témoignent de la renommée du Capétien en Palestine. L'une d'elles est menée par les "messagers d'un grand seigneur du fin fond de la Grèce, qui se faisait appeler le Grand Comnène, et sire de Trébizonde", qui, précise Joinville, apportent "au roi divers joyaux  en présent, entre autres des arcs de corne". Manuel 1er Comnène, qui règne depuis 1238, sur l'empire grec de Trézibonde, requiert la main d'une princesse capétienne du lignage de Louis IX. A quoi "le roi répond qu'il n'en a amené aucune d'outre-mer" et enjoint les diplomates grecs de se rendre auprès de Baudoin II, l'Empereur latin de Constantinople, "qui est cousin du roi, et de lui demander de leur donner une femme pour leur maître".

A Sidon, Louis IX est rejoint par la reine Marguerite de Provence, qui était jusque là restée à Saint Jean d'Acre et vient de mettre au monde leur huitième enfant, une petite fille prénommée Blanche, comme sa grand-mère paternelle, Blanche de Castille. Mais il n'a guère le temps de se consacrer à sa famille. Bien que les travaux de fortification de Sidon soient en voie d'achèvement, les Etats latins de Terre Sainte restent à la merci du puissant sultan al-Nasir, toujours aussi menaçant. Mais n'ayant pu en venir à bout par les armes, le roi engage des pourparlers dans la perspective d'obtenir une trêve. Chrétiens et Musulmans signent la paix au mois de février 1253 pour une durée de deux ans, six mois et quarante jours. Cet accord se résume malheureusement à un pacte de non agression et n'assure aucun gain de territoire au Capétien. Les terres perdues par les Etats latins le sont donc définitivement, en particulier la ville et le royaume de Jérusalem, si chers au coeur du roi de France.
Au cours des quelque trois années de son séjour en Terre Sainte, Louis IX n'a pas réussi à reprendre la Ville Sainte : la septième croisade est un échec, et il lui faut maintenant songer à regagner son royaume. En ce début d'année 1253, il ne sait pas encore que sa mère, Blanche de Castille, est morte au mois de novembre précédent : la nouvelle lui parviendra au printemps et l'incitera à précipiter son retour en Occident.