LES CAPETIENS
LOUIS IX, CHEF D'ETAT

 

LE TRAITE DE CORBEIL : LOUIS IX FAIT LA PAIX AVEC L'ARAGON
(11 mai 1258)

Une vieille querelle oppose la France à l'Aragon : l'une revendique la marche d'Espagne, l'autre le Midi de la France. Louis IX, désireux d'oeuvrer pour la paix, et Jacques 1er d'Aragon, plus préoccupé par sa "Reconquista" sur les Maures, parviendront à un accord en 1258. Le 11 mai, par le traité de Corbeil, chacun renoncera à ses prétentions sur le royaume de l'autre.

"Ce fut l'homme du monde qui plus se travailla de paix entre ses sujets et spécialement entre les riches hommes voisins et les princes du royaume", écrit à propos de Louis IX Jean de Joinville, sénéchal de Champagne et biographe du roi. La paix, qui, avec la justice, fait partie des devoirs qui s'imposent à un souverain chrétien soucieux de son salut éternel et de celui de ses sujets, est effectivement l'une des préoccupations majeures du Capétien. Voulant éliminer les motifs de conflit, celui-ci, pour donner l'exemple, joue l'apaisement dans les affaires dans lesquelles il est impliqué et préfère les solutions négociées. Le règlement du différend avec le "riche homme voisin" d'Aragon en est une illustration.
La querelle est d'abord affaire de frontière. Louis IX garde la nostalgie de la vieille marche d'Espagne fondée par Charlemagne, territoire débordant sur le versant méridional des Pyrénées et comprenant, entre autres, les comtés de Roussillon et de Barcelone. Les Capétiens en ont, en principe, hérité. Mais les liens avec la Couronne se sont peu à peu distendus et sont quasiment rompus depuis la fin du XIIème siècle.

En 1180, un concilen réuni à Taragone, a prescrit la substitution de la datation de l'ère chrétienne à celle des souverains français pour les actes écrits concernant ces territoires; en 1162, les comtes de Barcelone sont devenus rois d'Aragon et ont cessé de faire hommage au roi de France. Qui plus est, au fil des ans, du fait d'alliances vassaliques, matrimoniales ou d'héritages, la Maison d'Aragon a été en position de prétendre à la suzeraineté sur Carcassonne, Montpellier et Millau, devenues pommes de discorde.
Avec la fin de la croisade contre les Albigeois et les traités de Meaux-Paris et de Melun en 1229, le Midi, dont Carcassonne et Millau, s'est trouvé soudé au royaume de France. C'est alors que les Aragonais ont eux aussi eu la nostalgie de leurs possessions passées. En 1234 et 1240-1242, on a été à deux doigts d'une guerre franco-aragonaise à cause de Millau, brièvement occupée militairement en 1237. Pour contrer toute menace sur Carcassonne, Louis IX a fait fortifier la cité et consolider les châteaux forts de Peyrepertuse et Quéribus. Les choses ont encore empiré en 1252, quand l'évêque de Maguelonne, tenant du fief de Montpellier, ville que Pierre II d'Aragon a obtenue par son mariage avec la dernière héritière des Guilhem de Montpellier, s'est souvenu être vassal de Louis IX, reléguant Jacques 1er au rang d'arrière-vassal. L'Aragonais a riposté en reprenant ses revendications sur Millau. Quant aux infants d'Aragon, ils ont, en représailles, fait des incursions dans le pays de Carcassonne. Certes, le conflit n'a pas pris de grandes proportions; mais la qurelle semble insoluble.

En 1255, la raison prévaut. Louis IX et Jacques 1er acceptent de s'en remettre à l'arbitrage de deux chanoines, l'un catalan, l'autre français. Les conclusions des deux religieux sont recueillies en mars 1258, côté aragonais par l'évêque de Barcelone, côté français par le prieur de Corneillan et Guillaume de Roquefeuil, chargés de préparer un accord. Ce travail débouche le 11 mai 1258 sur le traité de Corbeil, ratifié à Barcelone le 16 juillet suivant. Louis IX renonce à son héritage carolingien, et donc à sa souveraineté sur la marche d'Espagne, et oublie le comté de Barcelone. Jacques 1er abandonne ses prétentions sur les terres s'étendant du Toulousain à la partie méridionale du Massif Central, et donc sur Carcassonne et Millau. Il est stipulé que le roi de France recevra le Fenouilledès, situé entre Corbières et Pyrénées, en échange du Roussillon et du Besalù. Enfin, le traité est complété par une convention matrimoniale prévoyant le mariage d'Isabelle d'Aragon avec le second fils du Capétien, le futur Philippe III le Hardi, qui sera célébré en 1262.
La querelle franco-aragonaise semble définitivement réglée. Elle ne l'est qu'en partie. La question de Montpellier, restée en suspens, ne va pas tader à ressurgir. En 1264, un bourgeois de la ville, en conflit avec son seigneur, en appelle au sénéchal de Beaucaire. Jacques 1er, faisant de nouveau valoir sa suzeraineté, demande à Louis IX de ne pas intervenir. Le Capétien, se référant à des titres de 1155, à l'instar de l'évêque de Maguelonne, déclare que Montpellier relève de la Couronne de France et annonce même qu'il est prêt au conflit armé. Sa fermeté esr payante : l'affaire n'ira pas plus loin. Quant au Roussillon, il va lui aussi rester une pomme de discorde : il ne reviendra à la France que sous le règne de Louis XIV, par le traité des Pyrénées en novembre 1659.

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